2001 : une Europe linguistique sans frontières

01 Janvier 1900 | par

En matière d’emploi et de mobilité professionnelle, le multilinguisme ouvre de nouvelles perspectives, par-delà les frontières nationales.

Les langues et l’emploi

Des études prouvent que de nombreuses entreprises perdent d’importantes parts de marché parce qu’elles ne parlent pas la langue de leurs clients. Pour remédier à cette situation, la Commission européenne finance des projets lancés au niveau national, international et régional. Ces projets visent à concevoir, tester, valider, évaluer et diffuser du matériel didactique et des méthodes d’apprentissages nouvelles adaptées aux besoins de chaque activité professionnelle. Apprendre une langue aujourd’hui c’est bien plus que s’asseoir à un bureau pour faire des exercices de grammaire. Les méthodes modernes d’apprentissage peuvent être plus amusantes et plus efficaces.

Le label européen

Dans chaque pays de l‘Union, un « label européen » est décerné aux initiatives considérées comme les plus novatrices et les plus originales. L’objectif du label est d’encourager l’intérêt du public envers l’apprentissage des langues en lui révélant de nouvelles méthodes d’apprentissage, moins rébarbatives et plus ludiques et cela à toutes les étapes de l’éducation et de la formation, de l’enseignement maternel jusqu’à l’enseignement des aînés. Les établissements qui obtiennent le label peuvent l’utiliser, ainsi que le logo, dans leurs locaux et sur leur matériel promotionnel.

La diversité culturelle : l’enjeu du XXIe siècle
« Notre culture nous donne notre identité », déclare l’écrivain américain Jeremy Rifkin. Elle nourrit notre histoire, notre créativité et notre pensée. La richesse des cultures du monde est la clé du développement économique et social. La diversité culturelle et par conséquent la diversité des langues est aussi essentielle à notre survie que l’est la biodiversité de la planète. 
L’enjeu de la plus grande bataille du XXIe siècle sera la préservation de notre diversité culturelle. A ce propos, les avis divergent. Pour les partisans de la mondialisation, les différentes cultures y gagneront car elles auront l’occasion, grâce aux nouvelles techniques de communication de se faire connaître d’un bout à l’autre de la planète. Pour les opposants, les cultures du monde ne sont pas des biens comme les autres, et les traiter comme telles serait dangereux. Le risque serait d’assister à la destruction de la diversité culturelle (mode de vie, croyances, langues, valeurs et traditions) et à l’uniformisation du monde.

Halte à la mort des langues… !
Une langue disparaît tous les quinze jours. Les minorités sont en danger. On en veut pour preuve le gigantesque travail qu’effectue l’Unesco au Brésil pour sauver de l’oubli des idiomes et des dialectes menacés. C’est également le sujet de la thèse du linguiste Claude Hagège : « Une vieille dame de 94 ans est morte en 1987, à Pala, en Californie. Elle était la dernière à connaître le cupeño. Plus personne ne parle cette vieille langue nord-américaine. Fini, donc, le cupeño. Mais aussi le matipú, l'amapá, le sikiana... Terminés l'apiakà, le koiari, le yimas... Oubliés le yugh, le palaung, le bahnar... Les vieillards s'en vont, les langues aussi. La moitié des 6.800 langues actuelles auront disparu dans un siècle, emportées par la grande machine à communiquer. »
Et après? Que nous importe, finalement, qu'on ne parle plus le pataxó ou le nakrehé? « Les langues, explique-t-il, sont un peu comme les espèces animales : elles vivent, meurent, cèdent aux assauts des prédateurs. Ce ne sont pas seulement des mots qui s'envolent avec chacune d'elles. C'est une histoire, une mémoire, une manière de penser. Un peu de notre humanité, la perte d’un chapitre de notre histoire humaine. »

Pourquoi ces disparitions ?
Principale cause : les locuteurs. Il faut au moins 100.000 locuteurs pour qu'une langue puisse se transmettre de génération en génération. Or la moitié des langues recensées sont parlées par de petites communautés de moins de 2.500 personnes, donc elles disparaissent.
Mais d’autres facteurs interviennent. Les guerres, les génocides, les catastrophes naturelles, l'adoption de langues dominantes comme le chinois et le russe, la mondialisation des techniques de communication, les réglementations interdisant l'usage d'une langue, le manque de traditions, contribuent également au déclin des langues.
La mort d'une langue a des conséquences qui vont bien au-delà de la communauté touchée. Les linguistes, anthropologues et autres scientifiques perdent une mine d'informations pour leurs recherches sur l'histoire, les savoirs et les migrations des peuples. La diversité linguistique se réduit dans le monde.
L’Europe est également concernée par ce problème avec le basque, le wallon, le romanichel, l’occitan et tant d’autres encore…C’est à ce titre que l’union européenne a créé, en novembre 1992, une Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, une idée de base tout à fait intelligente voire méritoire, mais qui aujourd’hui encore ne fait pas l’unanimité. Pour les uns, cette charte représente une contribution importante à la construction d'une Europe fondée sur les principes de la démocratie et de la diversité culturelle. Lutter contre les différences serait suicidaire. Pour les autres, protéger le patrimoine culturel des minorités pourrait encourager la montée des nationalismes régionaux. Et de parler de balkanisation de la France, de l’Allemagne…

L’année européenne des langues lance une campagne d’information au niveau européen : site spécial sur Internet http://www.eurolang2001.org/eyl/common/home.asp?LANG=FR
présentant info en détail, documents, expositions, manifestations, journées portes ouvertes, journée linguistique du 26 septembre 2001, concours, apprentissages…
Un sigle sympathique a été choisi pour illustrer cette année européenne des langues, un caméléon bleu qui nous laisse le message suivant : « Bonjour, je suis le caméléon de l’année européenne des langues. Je suis capable de changer de couleur pour m’adapter à chaque nouvel environnement rencontré. Ma langue, très longue et très souple, s’adapte aussi et me permet de me faire comprendre dans de nombreux pays.

 

 

Près de 7.000 langues sont parlées sur la Terre, mais une douzaine seulement, d’un point de vue géopolitique, ont une importance mondiale et sont parlées par deux milliards d’hommes.

 

Famille chinoise 

900 millions

Famille indienne indo-européenne 

450 millions

Anglais 

369 millions

Espagnol 

225 millions

Russe et Biélorusse 

170 millions

Portugais 

133 millions

Allemand 

120 millions

Japonais 

100 millions

Français 

95 millions

Arabe 

85 millions

Groupe malais-javanais 

70 millions

 

Les langues artificielles

Face à la diversité linguistique de la planète, des langues artificielles comme l’Espéranto ou le Logan ont été proposées pour simplifier les rencontres. L’Espéranto a connu un certain, mais pour des locuteurs parlant des langues autres que les langues romanes ou germaniques, l'espéranto était assez difficile à apprendre. Le LOGLAN ou « Logical Language », nouveau langage destiné à un usage international a été présenté comme libre de toute attache culturelle. Ce langage, créé en laboratoire, est censé permettre aux locuteurs d'exprimer leurs pensées clairement et sans ambiguïté. Son système phonique est limité et sa grammaire comprend peu de règles. Son vocabulaire provient des huit langues les plus parlées actuellement dans le monde. Cependant, même si une langue internationale parfaite était créée et adoptée, nous n'aurions en aucun cas l'assurance que les problèmes de communication seraient réduits. Bien plus, on ne comprend toujours pas les processus de pensée qui lient les idées aux langues. Même si chacun apprenait sérieusement l'espéranto ou le LOGLAN, il est probable que des phénomènes de modification de langue apparaîtraient assez vite. Il existerait ainsi, de par le monde, des dialectes issus de l’Espéranto ou de toute autre langue artificielle.

 

Les Européens et les langues

Si notre monde a connu des progrès prodigieux en matière de télécommunication, il reste encore beaucoup à faire en ce qui concerne les relations linguistiques entre les Européens, comme nous le montre le tableau ci-dessous.

 

Pays

Langue maternelle

Une langue étrangère

Deux langues étrangères

Plus de deux langues étrangères

Luxembourg

1 %

10 %

47%

42%

Pays –bas

28%

29%

32%

12%

Danemark

40 %

30%

25%

6%

Belgique

51%

22%

18%

9%

Updated on 06 Octobre 2016