Brive - Clermont-Ferrand Reprendre la route avec Antoine

Du 29 juin au 21 septembre, des reliques de saint Antoine vont cheminer de Brive-la-Gaillarde à Padoue. L’occasion pour nous d’emprunter ce même chemin, en le ponctuant de quelques étapes bien franciscaines. Et avec un compagnon exceptionnel…
15 Juin 2025 | par

Ainsi donc, cher Antoine, tu as décidé de marcher avec nous jusqu’à Padoue, exactement comme il y a 8 siècles quand tu es retourné en Italie à la demande de tes supérieurs. 

Brive-la-Gaillarde
Ici, aux grottes, tes yeux cherchent à retrouver les lieux où tu as si souvent veillé et prié. Mais tu as beau scruter le rocher, tout a changé. Et si tu descends en ville, tu ne verras pas le petit couvent que tu avais fondé en 1226, un peu en dehors des remparts – à sa place, aujourd’hui, c’est la poste, square Charles Boudy. Tu ne peux pas imaginer, cher Antoine, le nombre de guerres, de révolutions, d’expulsions qui ont périodiquement dispersé les frères et démoli les monuments. Mais, ce qui est épatant, c’est que les gens ne se sont jamais découragés, ils sont toujours revenus prier aux grottes et ils ont rebâti. Et tes frères sont revenus eux aussi. Et Dieu a continué à faire des miracles. Après la Révolution française, ton ermitage, avec la grotte et la chapelle, sont vendus comme biens nationaux. Mais les pèlerins recommencent à affluer, et un prêtre réussit à racheter les lieux et à les rendre aux frères (1875). Avec l’arrivée du chemin de fer – tu sais, Antoine, c’est bien pratique – les fidèles sont toujours plus nombreux et il faut bâtir un sanctuaire qui puisse les accueillir. La grande église que tu as devant toi, a été construite en seulement deux années, entre 1893 et 1895, grâce à la générosité de tertiaires du monde entier (y compris chinois). En 1895, année du septième centenaire de ta naissance, c’est l’effervescence sur le rocher, avec des cérémonies toutes plus grandioses les unes que les autres, et des centaines de milliers de pèlerins. 
Ce qui n’a pas changé depuis ton époque, cher Antoine, c’est l’affection mutuelle que se portent les fils de saint François et les gens d’ici. Cela s’est encore vérifié au cours de la Deuxième Guerre mondiale, lorsque les frères ont participé à la Résistance, protégé des Juifs et contribué à la libération de Brive. Et pour te remercier, Antoine, de les avoir protégés du haut du Ciel, les habitants ont fait ériger cette statue monumentale qui domine la ville et où tu es représenté sous les traits d’un frère très aimé ici, Léon Bédrune (†1996).

Vicq-sur-Breuilh
Cher Antoine, au hasard de tes pérégrinations en Limousin, es-tu entré dans cette petite chapelle dédiée à Notre-Dame et dite « des chauveix », un peu à l’écart du village de Vicq-sur-Breuilh ? Je te préviens, tu vas être surpris : entre 2005 et 2008, la chapelle a été entièrement couverte de fresques consacrées non pas à ta vie, mais à celle de ton père et frère, François d’Assise. On doit ce tour de force à Roch Popelier, un peintre et céramiste né à Limoges en 1935. C’est vraiment « l’œuvre de sa vie ». Il y a mis toute sa passion et son génie créateur. Ici, la stigmatisation, là le Christ de Saint-Damien, et là Le loup de Gubbio. Qu’en penses-tu cher Antoine ?

Solignac
Son abbatiale romane et son étonnante succession de coupoles… Dis-moi Antoine, cela ne te rappelle rien ? Oui, c’est un peu Padoue en Limousin. Ici, tu as été accueilli par des « moines noirs », les Bénédictins, et tu as accompli un miracle en leur faveur. Le moine hôtelier était tenté de ne pas être fidèle à son vœu de chasteté et tu as deviné son souci. Alors, tu te souviens de ce que tu as fait ? Tu as revêtu le religieux de ta propre tunique de dessous et, « chose admirable à dire », aussitôt la tentation a disparu. Au fait, sais-tu que les Bénédictins qui avaient quitté les lieux à la Révolution, sont revenus en 2021 ? Ils sont une dizaine, et s’ils connaissent la tentation, je sais à qui ils peuvent s’adresser.

Limoges
Rue des Arènes ! Frère Antoine, as-tu gardé le souvenir de la ville épiscopale, de la cité autour de Saint-Martial et du prodige que tu as accompli « au creux des arènes » ? Même si cela doit écorner ton humilité, je te rappelle les faits grâce à Jean Rigauld, ton biographe : un jour, tu avais convoqué le peuple de Limoges pour une prédication solennelle, et il y avait une telle foule rassemblée qu’aucune église n’était suffisante pour contenir cette multitude. Tu entraînas alors le peuple en un lieu suffisamment vaste, où il y avait eu autrefois un palais des infidèles païens – c’est toujours ton biographe qui parle ! –, lieu qui s’appelle le creux des arènes, et où le peuple pouvait commodément s’asseoir et écouter tranquillement la Parole de Dieu. Mais l’orage menace, le tonnerre gronde, et les gens – tu sais comment ils sont, les gens – commencent à s’en aller. Alors, ni une ni deux, tu promets à la foule que la pluie ne la touchera pas. De fait, à la fin de ton sermon, les auditeurs constatent qu’ils sont restés bien au sec, alors que tout alentour est détrempé.
Cher Antoine, tu avais tout simplement utilisé les vieilles arènes romaines comme auditorium… Aujourd’hui elles ont pratiquement disparu. Mais pas la vie franciscaine ! Si le couvent où tu as résidé n’existe plus, rapprochons-nous de la cathédrale et, juste à côté, d’un ancien monastère de Clarisses – aujourd’hui à la fois café solidaire et lieu culturel, connu sous le nom de « parvis des clarisses ». Dans les bâtiments conventuels, vit depuis 2006 une petite fraternité de sœurs de saint François d’Assise – souriantes, accueillantes, fraternelles et tout et tout,  tu vas parfaitement t’entendre avec elles.

Clermont-Ferrand
Les frères sont présents à Clermont-Ferrand depuis 1224… Tu es donc peut-être déjà venu ici, cher Antoine, mais, désolé, rien dans les archives ! En revanche, il subsiste deux anciennes églises de Cordeliers, dont l’une a été consacrée en 1284 et récemment restaurée (non loin de l’actuelle préfecture). Regarde ces superbes ogives, ces baies très allongées ! C’est l’élégance gothique à la française. Au fil des siècles, d’autres frères sont venus s’implanter à Clermont-Ferrand, comme les Capucins en 1608. Chassés à la Révolution, ils reviennent en 1856 à la demande de l’évêque. Ils construisent un couvent, une chapelle et, tant bien que mal, ils sont toujours là, au 9 du boulevard Lafayette. Ils sont très appréciés dans la ville, par des gens de tous les milieux sociaux, et beaucoup viennent se confesser chez eux. Et puis les frères de Clermont ont connu une grande joie le 12 octobre dernier : le frère Marie-Geoffroy Guérin a fait sa profession solennelle – son engagement définitif dans l’ordre. Un frère de plus, cher Antoine.
Le mois prochain, cher Antoine, nous poursuivrons notre chemin antonien-franciscain : nous partirons de Montbrison et nous irons à Saint-Jean-de-Maurienne, en passant par Lyon, Chambéry, et La Chambre. 

Updated on 15 Juin 2025
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