Célébration des funérailles par des laïcs

01 Janvier 1900 | par

La Commission épiscopale de Liturgie et de Pastorale sacramentelle a publié plusieurs dossiers sur la pastorale des funérailles. Depuis le premier, publié en 1985 (1), le contexte culturel et social de la mort a évolué. Dans bon nombre de diocèses, des pratiques nouvelles se sont mises en place pour le service des familles en deuil.

Ainsi, à Angers, les équipes ont reçu en 1990, de la part de leur ancien évêque, Mgr Jean Orchampt, des orientations, complétées en 1996. Elles portent essentiellement sur le sens des funérailles chrétiennes ; la célébration des funérailles au sens large ; la crémation et la célébration liturgique. Ces orientations évoquent aussi les obsèques pour des personnes n’appartenant pas à la religion catholique. Elles révèlent surtout les grands axes de la mission confiée aux laïcs, nommés officiellement pour cette pastorale.


Les laïcs, relais entre le prêtre et la famille


Le cœur de cette mission est l’évangélisation : « Etre proches comme le Christ et en son nom de toutes les personnes qui souffrent en vivant un deuil », précise le père Gilles Crand, responsable de la Pastorale des Funérailles d’Angers.

Pour M. B., responsable adjointe au Service diocésain de la Pastorale Sacramentelle et liturgique (SDPSL) dans le même diocèse, cette mission s’inscrit dans celle de tout laïc dans l’Eglise : « Il me semble, explique-t-elle, que tous les fidèles chrétiens participent par leur baptême à la mission de l’Eglise qui s’exprime autour des axes suivants : célébrer, annoncer et servir. » Un service qui doit toujours se ressourcer dans le Christ : « Si ma mission essentielle est d’animer, de former des personnes (prêtres, diacres, laïcs), je suis persuadée que le cœur de cette mission nécessite des pauses spirituelles pour se poser, se reposer sous le regard de cet Amour de Dieu, incarné dans le Christ. Sinon, le faire risque de prendre le pas sur l’être chrétien. L’apôtre l’est pleinement s’il est d’abord disciple. » Dans un va-et-vient continuel et la nécessaire collaboration entre les différents ministères : « Prêtre, diacre, laïc se retrouvent dans la Commission diocésaine, égaux en dignité. Mais divers ministères et diverses fonctions expriment et dévoilent progressivement le mystère du Christ à son Eglise. »

Aussi les laïcs sont-ils des relais entre le prêtre de la paroisse et les familles en deuil. Sans être des ministes ordonnés, comme les diacres ou les prêtres, ils ont ainsi pour rôle essentiellement l’accompagnement des familles en deuil et la prise en charge de la sépulture, lorsque le prêtre ou le diacre ne peuvent être présents.

Pour l’équipe d’Angers que nous avons interrogée, les familles en deuil sont parfois étonnées de cette prise en charge par des laïcs, souvent interrogatrices, mais jamais hostiles. Une enquête plus large révélerait certainement des réactions plus nuancées, comme le laisse entendre le courrier des lecteurs publié dans Le Messager (septembre 2001, page 28).


Accompagner les familles en deuil


Comment se réalise concrètement cette collaboration entre prêtres et laïcs dans le cas précis des funérailles ?

Jeannette Richard, membre d’une équipe de la Pastorale des funérailles dans ce même diocèse, explique : « Chaque fois que je suis appelée à célébrer des funérailles, le prêtre présent dialogue avec la famille pour la prévenir, me présenter. Je n’ai pas rencontré d’hostilité, parfois de l’étonnement. Je n’ai rencontré que des personnes accueillantes dont j’ai pu me faire proche…Ces familles sont dans la peine. Elles attendent de la bienveillance, une écoute, de la compassion, une aide pour la préparation de la célébration qu’ils veulent pas trop longue, et surtout recueillie. »

Et lorsque la famille désire la présence du prêtre pour une Eucharistie ? « S’il n’est pas disponible, ce prêtre demande alors à la famille de changer l’heure de la sépulture ou de trouver elle-même un autre prêtre. Je crois que cela se passe dans le respect des uns et des autres. »


Accueil, rencontre, prière


Les directives de 1996, édictées par le diocèse d’Angers, précisent les moments principaux de cet accompagnement : accueil, rencontre, prière : « Vivre l’accueil et la rencontre des familles en deuil ; prier avec les familles auprès du défunt et aider à la préparation de la célébration ; prendre une place dans la célébration elle-même (mot d’accueil, prières, témoignages) et susciter la participation active des assistants, famille et amis. Maintenir ensuite un lien avec les familles dans la peine. » Cet accompagnement peut comporter ainsi plusieurs étapes dont celle de la veillée de prière à la maison ; l’aide aux familles dans la préparation de la célébration aux obsèques ; la célébration proprement dite ; enfin, l’accompagnement au cimetière ou au crématorium.

Si la célébration des funérailles est une liturgie de la parole sans Eucharistie, la communauté chrétienne fera mention de ce défunt lors de la messe paroissiale du dimanche. En outre, la prière de l’Eglise qui a accompagné le défunt peut être reprise lors de la messe paroissiale du samedi soir ou du dimanche, à une date convenue avec la famille.

La messe des funérailles, du fait du nombre réduit de prêtres, peut aussi être dissociée de la célébration des funérailles. Famille et amis du défunt seront alors invités à une messe d’un dimanche suivant les obsèques où mémoire sera faite du défunt.

Jeannette Richard évoque avec émotion une célébration récente : « J’ai été marquée par plusieurs sépultures, en particulier celle d’une demoiselle de 90 ans. J’ai été appelée par le prêtre, comme toujours. Disponible à ce moment-là, j’ai préparé la célébration. De cette dame âgée, sous tutelle, je ne savais que trois choses : elle avait été couturière, dans un foyer logement, elle tapait la belote avant d’être hémiplégique et de marcher avec un déambulateur, enfin, dans ses affaires, on avait retrouvé un chapelet, seul indice de sa foi chrétienne. »

Quant à la cérémonie elle-même, elle révéla l’importance des signes, qui touchent même ceux qui sont éloignés de l’Eglise : « Seules quatre personnes, âgées elles aussi, étaient présentes aux funérailles. Une a accepté de lire un texte de saint Jean ; la personne responsable de la tutelle n’a pas voulu lire la prière universelle n’étant pas elle-même catholique ; les deux autres dames ont allumé une lumière sur le cercueil. A la fin de la célébration, j’ai demandé aux deux dames de reprendre les lumières, de les porter près d’une statue de la Vierge pour dire ensemble un simple Je vous salue Marie que tout le monde connaissait. »

Ce rôle actif des laïcs dans une circonstance particulièrement sensible comme la Pastorale des funérailles ne s’improvise pas : tous reçoivent la formation théologique et spirituelle qui leur permet d’entrer dans le sens de la célébration des funérailles ; et la formation psychologique indispensableà une approche humaine des familles dans un moment partoculièrement difficile (lire l’encadré).

Dans le diocèse d’Angers, comme tout autre diocèse, les laïcs engagés dans la pastorale des funérailles, travaillent – cela va de soi – en collaboration étroite avec les prêtres, y compris dans l’accompagnement des familles et la préparation des sépultures.

Pas de crainte donc, car dans ces équipes, chacun reçoit et remplit fidèlement la mission d’aider, de soulager et de rendre compte de la foi au Christ mort et ressuscité. Et surtout de l’espérance qui doit nous soutenir lorsque le deuil frappe à nos portes.


(1) La Pastorale des funérailles. Situation, enjeux, rôle des laïcs, propositions d’action. Dossiers de la Commission épiscopale de Liturgie et de Pastorale Sacramentelle, n°3, septembre 1985.

Autre référence sur ce sujet : Points de repère pour la pastorale des funérailles. Documents épiscopat, n° 13-14, septembre 1997.















Formation dans le diocèse d’Angers


Dans le diocèse d’Angers, la formation des laïcs qui accompagnent les familles en deuil dure deux ans, avec des rencontres régulières, autour de plusieurs axes :





  • Réflexion sur la mission des chrétiens et le sens du deuil.



  • Aide humaine et psychologique que ces chrétiens peuvent apporter.



  • Formation biblique et théologique pour approfondir le sens de l’Espérance chrétienne.



Les laïcs sont préparés par une équipe de 2, 3 personnes qui font partie de la Commission diocésaine de la liturgie.




 















Témoignage

Accompagner malades et mourants à l’hôpital


De nombreuses personnes meurent à l’hôpital. Pour l’Abbé Philippe, 35 ans, un des deux aumôniers prêtres du CHU de Poitiers, « la mission d’aumônier d’hôpital est d’abord une mission de présence du Christ compatissant et souffrant avec celui qui vit dans l’angoisse de la maladie, de la souffrance et de l’approche de la mort. »


Accompagnez-vous des malades en fin de vie ?

Le cas échéant, bien sûr. Heureusement, tous ceux qui nous appellent ne meurent pas !

Quel est, d’après vous, le rôle premier de l’aumônier d’hôpital…

Répondre aux appels, ceux du malade, de la famille ou du personnel hospitalier. Selon les aumôneries d’hôpitaux, l’aumônier d’hôpital peut ou non passer de manière systématique. D’ailleurs, je m’aperçois, avec ma petite expérience d’un an, qu’à l’approche de la mort, la réaction d’incrudilité, de rejet, vient surtout de la famille. Les malades eux-mêmes se préparent d’une certaine manière à la mort. C’est souvent la famille qui freine l’arrivée du prêtre. Ou, alors, elle l’appelle quand le malade est dans le coma. L’idéal est de donner le sacrement des malades, quand il est conscient. Dans le doute – on ne sait jamais le degré de conscience du malade – je donne le sacrement. Par contre, il n’est pas possible de donner le sacrement contre la volonté de la famille.


Célébrez-vous le sacrement de l’Onction des malades ?

Heureusement, le Concile Vatican II a encouragé une nouvelle appellation de ce sacrement : onction des malades, plutôt qu’ extrême-onction). Cela ne change rien sur les conditions requises pour donner ce sacrement : maladie grave ou âge. La présentation du sacrement est importante, les gens ont parfois peur : si vous venez, c’est que je vais mourir, disent-ils. Je les rassure…


Comment se édroule cette célébration ?

Pour l’onction des malades en tant que telle, il y a une petite prière puis une préparation pénitentielle. Même si l’onction des malades remet les péchés, je propose le sacrement du pardon à ceux qui ont la faculté de se confesser. Tout homme a une soif de rédemption, de salut. Ce moment de la mort réveille des réflexes fondamentaux, vitaux d’une conscience spirituelle plus ou moins importante. Il m’arrive aussi souvent de donner l’absolution sous condition à des gens qui ne peuvent pas parler. Je leur dis : Demandez pardon au Bon Dieu dans votre cœur. A l’heure de la mort, tout prêtre a aussi les pouvoirs du Saint-Siège d’accorder l’indulgence plénière. Quand vient l’onction des malades proprement dite, le geste essentiel du sacrement, c’est de prendre l’huile des malades et de faire trois onctions par trois croix sur le front et dans les mains.


Quel est le vrai sens de ce sacrement ?

Le Bon Dieu a instauré un sacrement pour donner une force particulière au fidèle afin qu’il puisse traverser ce moment d’épreuve. Le but premier est la guérison spirituelle. Il peut aussi arriver, dans des cas plus rares, que le sacrement procure une guérison physique.

Après d’autres prières, dont le Notre Père, je propose la communion, ou viatique, au malade (même une petite parcelle d’hostie). Je termine souvent par une prière à la Vierge Marie. Je me souviens d’un jeune garçon, malade du sida, à l’agonie, qui n’avait eu aucune réaction jusque-là. Il s’est mis à pleurer lorsque j’ai entonné un chant traditionnel à la Vierge. Jamais je n’ai vu de personne refuser l’onction des malades. Beaucoup de familles m’ont dit aussi qu’après avoir reçu le sacrement, le malade était apaisé et disposé à partir.


Encouragez-vous la prière pour les morts ?

En tant que prêtre, l’essentiel pour moi dans les funérailles, c’est la messe où le Christ lui-même s’offre… Il est important de prier pour nos morts et de faire dire des messes pour eux. Mon ministère est lourd, mais en même temps passionnant, car il va tout de suite à l’essentiel de la vie des gens. L’hôpital est vraiment un lieu missionnaire.



Updated on 06 Octobre 2016