Claire d'Assise : 750 ans après

16 Mars 2004 | par

C'était le 11 août 1253. Au plus fort de l'été, dans le monastère de Saint-Damien, Claire, gravement malade, attendait la rencontre avec sœur la mort. Avant de dire, comme le vieillard Siméon : Seigneur, tu peux maintenant laisser ta servante s'en aller dans ta paix , il lui restait à accomplir une mission qui avait été le rêve de sa vie : obtenir du pape Innocent IV l'approbation de la Règle et laisser en héritage à ses Sœurs l'idéal de la parfaite pauvreté.
Claire avait lutté toute sa vie pour obtenir cette Règle et ce privilège. Quelque temps avant sa mort, le pape avait pu constater de ses propres yeux la vie austère de la fondatrice des Pauvres Dames et lui avait proposé d'en mitiger la rigueur. Claire avait répondu : Sainteté, donnez-moi l'absolution de mes péchés, mais ne me dispensez pas du vœu de pauvreté que j'ai toujours pratiqué fidèlement. Ainsi la Règle était restée dans les tiroirs... jusqu'au jour où, passant de nouveau près du monastère, il fut informé que Claire attendait de lui un signe, avant de mourir en paix. Et le pape avait envoyé, le 11 août 1253, un messager portant la bulle d'approbation de la Règle.
L'histoire dit que Claire écouta ravie la lettre du pape et bien que proche de la mort, elle l'approcha de sa bouche et l'embrassa avec grande dévotion. Le lendemain, rapporte son procès de canonisation, Dame Claire, vraiment claire, sans tache, sans obscurité de péché, passa des ténèbres de ce monde à la clarté de l'éternelle lumière.

Sa rencontre avec François
Claire, jeune fille d'une grande beauté, appartenant à la noble lignée des Offredducci, place Saint-Rufin, avait été profondément émue par l'événement qui avait secoué la ville d'Assise vers l'année 1205 : François, fils du riche marchant de tissus, Bernardone, avait abandonné une vie brillante pleine de promesses et tout héritage paternel pour vivre l'Evangile du Christ dans toute sa pureté. Vous le vivre intégralement, sans commentaires, répétera-t-il sans cesse à ses frères, c'est-à-dire sans aucun compromis. Son rêve ? Libérer de plus en plus son cœur du poids des richesses et du pouvoir, sources, à cette époque, d'innombrables injustices et malheurs. Etre un homme libre, comme les oiseaux du ciel qui ne sèment ni ne moissonnent ni n'amassent dans leurs greniers, mais que le Père céleste nourrit (Mt 6,26). Libre de l'avoir, pour être !
Bien des amis s'étaient mis à sa suite, et Claire, alors âgée de 18 ans, voulut en être du nombre. Mais sa parenté y était contraire et pour réaliser son projet, elle dut s'enfuir à la sauvette, par la porte du jardin, la nuit du 18 mars 1212, pour rejoindre François et ses compagnons, à Sainte-Marie des Anges...

Le choix de la pauvreté
François lui coupa sa belle chevelure, mis sur ses épaules une bure de toile et ceint ses reins d'une corde, tandis qu'elle promettait à Dieu de vivre en obéissance, en chasteté et en pauvreté. Pour la soustraire à ses frères et à son oncle, furieux, elle fut amenée chez les moniales bénédictines du monastère Saint-Paul. Le lendemain, les Offredducci se présentèrent pour la libérer, mais tandis qu'ils s'efforçaient de l'arracher à l'autel auquel elle s'était accrochée, son voile tomba et montra sa tête rasée. Epouvantées, ses ravisseurs s'en allèrent, la laissant libre de son destin. Puis, très tôt elle établit demeure près de l'église Saint-Damien, où vinrent la rejoindre de nombreuses compagnes de jeunesse, sa mère Ortolana et sa sœur Agnès. Ensemble, elle mirent les fondation du Deuxième Ordre de Saint-François, l'Ordre des Pauvres dames, appelées Clarisses du nom de leur fondatrice.
François vint rarement rendre visite à Claire et à ses compagnes, en esprit de détachement, qui est, lui aussi, une forme de pauvreté. Mais une histoire charmante raconte que Claire avait supplié François à genoux, dans la neige, de venir lui donner une dernière bénédiction. Et François, touché par cette invitation, n'avait su résister. Puis, au moment de se quitter, Claire avait lancé : Quand nous nous reverrons-nous Père ? Et François de répondre : Lorsque les roses fleuriront , espérant éloigner ainsi le plus possible la prochaine rencontre. C'était en plein hiver, en effet. Mais voici que Claire le rappela et lui dit : Regardez, Père . Et François se retournant vit, au milieu du buisson auparavant nu, des roses aux pétales flamboyants.

Lorsque Claire pleure François
Une autre fois, quelques mois avant sa mort, François, fatigué et malade, avait demandé l'hospitalité au monastère de Saint-Damien. Claire l'accueillit et lui donna, pour abri, une hutte recouverte de feuilles dans le jardin du monastère. C'est là, dit l'histoire, que François, sous l'inspiration de Claire, composa le Cantique de Frère Soleil, un hymne d'amour à Dieu pour toute la création.
Lorsque l'année suivante, François mourut, Claire obtint que son corps fût introduit dans la clôture du monastère, afin que les Sœurs puisent contempler son visage. Et, de sa cellule, elle put suivre, projetés sur ses murs, les rites et les prières de la sépulture de François qui se déroulaient dans l'église. Est-ce à cause de ce prodige qu'elle fut choisie comme patronne de la télévision ?
Après la mort de François (3 octobre 1226), Claire vécut encore pendant vingt-sept ans et mourut le 11 août 1253.

Claire et la pauvreté
La pauvreté fut le rêve de sa vie entière. Elle est inscrite dans la dénomination officielle de l'Ordre des Pauvres sœurs. Elle la voulut rigoureuse, en parfaite imitation de celle du Christ et de sa sainte Mère.
En obtint du pape Innocent III le privilège de ne posséder aucune propriété. Elle refusa les dons et les terrains que, pour mitiger sa rigueur, lui offrait le pape Grégoire IX et obtint de ce même pape que le privilège fut rédigé par écrit. Avec l'approbation de la Règle par Innocent IV en 1253, ce privilège fût inscrit officiellement dans sa Règle des Pauvres Dames qui le formue ainsi :
Les sœurs ne doivent rien s'approprier, ni maison, ni lieu, ni quoi que ce soit, mais, pèlerines et étrangères en ce siècle, servant le Seigneur dans la pauvreté et l'humilité, qu'elles envoient mendier pour elles avec confiance.

 

Updated on 06 Octobre 2016