Enseignante

18 Juillet 2006 | par

« Je suis épuisée. J’ai besoin de prendre du recul. Je ne me sens pas en sécurité », se confie Pauline à la fin de l’année scolaire. En avril dernier, la violence atteint son paroxysme dans son établissement. Un soir, avec une autre professeur, Pauline est agressée par des collégiens sur le chemin du métro. « Ils nous ont frappé à la tempe, raconte-t-elle, nous n’avons pas eu mal, mais le geste était extrêmement violent. Depuis, je suis régulièrement menacée. »
Comme nombre de professeurs au­jourd’hui en France, Pauline condamne le manque de soutien des équipes de direction. « Le proviseur n’a absolument pas réagi à mon agression. Il ne m’a pas dit un mot de soutien. C’est possible d’appréhender des élèves difficiles et même de faire de grandes choses avec eux, mais il faut pour cela travailler en équipe et en cohérence. »
Avec ses élèves, Pauline a fixé des règles de travail. « L’éducatif passe en premier lieu par un apprentissage de la vie en groupe. J’exige que mes élèves enlèvent leur manteau, leur casquette et leur chewing-gum, qu’ils s’assoient, sortent leurs affaires et se mettent dans une attitude de travail. C’est déjà très compliqué. » Puis vient un second temps, il faut obtenir le silence et faire respecter les différents temps de parole de chacun. Ensuite enfin, l’apprentissage des connaissances peut commencer. Sa pédagogie se construit sur deux mots d’ordre : l’exigence et la confiance à l’école des Salésiens. « Don Bosco a été très influencé par saint François de Sales, explique-t-elle. Tous deux ont une grande confiance dans l’homme et dans son changement. »
Généreuse et imaginative, elle n’hésite pas à ponctuer ses cours de travaux pratiques. L’étude des régions françaises se voit ainsi agrémenter d’une dégustation de fromages. La technique marche.
Quand Pauline a passé le Capes, c’était très clair : elle voulait enseigner dans le public. « C’était un choix positif, continue-t-elle. J’étais à fond dans l’Eglise, mais je voulais m’investir dans un milieu a priori pas chrétien pour créer un pont. J’avais aussi en tête qu’à moyen terme, je reviendrai dans l’enseignement catholique. »
Aujourd’hui, Pauline a demandé de passer à mi-temps pour se consacrer à la Pastorale. « J’achève une licence de théologie. J’ai animé une aumônerie en cinquième, un groupe de prière de paroisse et des messes en prison. J’ai aujourd’hui très envie de m’épanouir dans d’autres formes de transmission ».

 

Accueillir
« Je n’ai jamais fait de prosélytisme. Dans la salle des professeurs, j’ai d’abord été reconnue pour mon métier : ma rigueur et mon professionnalisme. Quelques-uns sont ensuite devenus des amis. Alors, comme avec certains de mes élèves, musulmans ou incroyants, nous avons eu, en dehors des cours, de très beaux échanges. Nous nous sommes confrontés à des situations très difficiles : élèves sans papiers, placés en famille d’accueil, forcés au mariage…
S’ils se confient à moi, je les accueille et je les accompagne. Je ne cherche sinon pas à me renseigner sur leurs situations personnelles. Mais elles se révèlent en générale très vite. Les professeurs sont de très bons indicateurs pour les assistantes sociales. Notre travail consiste alors à être des relais. Après une dure journée, ma foi m’aide à prendre le recul nécessaire sur le plan relationnel. C’est un soutien. Je dépose tout devant le Christ. »
Pauline

Updated on 06 Octobre 2016