Gentille, mais..

16 Mars 2004 | par

C'est vrai, insistait la dame occupée à confier à une amie ses secrets d'alcôve : chez nous, c'est une jeune fille de couleur qui s'occupe de nos enfants, mais elle est quand même gentille ! Vous n'avez probablement pas l'esprit aussi tordu que le mien qui voit partout des défauts, mais quand même... difficile de ne pas déceler, dans les dires de cette dame, le sentiment de supériorité qui place instinctivement les autres, les non-blancs, les étrangers, les immigrés, à un niveau de culture et d'humanité inférieur au nôtre. En revanche, il vous est certainement arrivé, dans un car, un bus de ville, une rame de métro, de voir des jeunes filles, des enfants de couleurs, vous offrir leur place, en raison peut-être de votre âge, alors que - vous l'avez constaté aussi -, la petite fille, confortablement assise, refuse de laisse sa place à un vieux monsieur visiblement handicapé, qui la lui demande gentiment... devant une grand-mère, étonnée, elle aussi, de la requête du monsieur ! Laquelle, de la jeune fille de couleur et de la petite fille, est la plus avancée en fait d'humanité ?
Il n'est pas difficile de constater parmi ceux et celles que nous rencontrons chaque jour dans la rue, au marché, au travail, dans un bureau d'accueil, de nombreuses différences de faciès, de couleurs, d'habillements, de langues et de comportements, mais pouvons-nous, à partir de là, juger de la valeur profonde de ceux qui croisent notre chemin ? Il y a, chez les personnes que nous considérons étrangères et venant de pays que nous désignons, avec un euphémisme, en voie de développement, c'est-à-dire, pour être clairs, non-développés, le respect de valeurs, telles que la vie, la place de la femme, l'éducation, les liens familiaux, que nous sommes en train de gommer par des coups de rayon, au nom d'une liberté qui se veut libre de toute contrainte, alors qui n'est, en fait, qu'un nouvel asservissement aux idéologies à la mode ?
Pour nourrir notre réflexion et éclairer notre vision chrétienne de la vie, voici quelques phrases, toutes simples, mais qui invitent à dépasser les apparences.
Lorsque Dieu a choisi le jeune David, parmi de jeunes gens beaux et forts, pour le placer à la tête de son peuple, il est dit : Les hommes ne voient que les yeux, mais Dieu voit le cœur (1 S 16,8). Prenons-nous le temps de connaître les personnes avant de les juger ?
Après la Pentecôte l'apôtre Philippe rencontre un Ethiopien, lui annonce le Christ ressuscité et lui donne la baptême (Ac 8,26-38). Au nom de quoi, si ce n'est de la peur et du rejet, réservons-nous notre estime, notre confiance et notre amitié aux gens de chez nous ?
Saint Antoine définit l'amour chrétien, vaste comme l'océan , c'est-à-dire sans limites, s'étendant aux amis et aux ennemis, aux bons et aux mauvais, aux blancs et aux noirs, aux gens de chez nous et aux étrangers... Dans le respect des lois, bien sûr, mais les lois seraient elles-mêmes vides de sens et inapplicables sans le souffle de l'amour.


 

Updated on 06 Octobre 2016