Jean XXIII - des Grottes Vaticanes à la basilique Saint-Pierre

01 Janvier 1900 | par

La foule, immense et émue, remplissait la place Saint-Pierre, ce matin de Pentecôte, pour assister à la translation du corps de Jean XXIII des Grottes vaticanes, où il reposait depuis le 3 juin 1963, dans un nouveau tombeau situé près de l’autel de saint Jérôme, dans la basilique Saint-Pierre. Le bon pape revenait ainsi parmi les siens, comme au soir de l’ouverture du concile (12 octobre 1962), où il avait dit au cours d’une veillée historique : « Donnez, de la part du pape, une caresse à vos enfants. ». Ou le 3 septembre 2000, jour de sa béatification. Depuis sa mort, en effet, sa popularité n’avait cessé de croître et dans son village natal, l’église de la paroisse s’était transformée en lieu de pèlerinage.
Comme pour tout rite de ce genre, la cérémonie du 3 juin avait été précédée, le 16 janvier 2000, de la reconnaissance canonique : une sorte de vérification légale, autorisée par le pape, faite devant témoins et avalisée par une commission d’experts, pour certifier l’authenticité du corps du défunt. Il en fut ainsi, on s’en souvient, pour le corps de saint Antoine, durant l’hiver 1981.

Corps intact ou témoignage de sainteté ?

Une émotion exceptionnelle avait parcouru les personnes présentes lorsqu’on constata que le corps du Pape défunt était demeuré intact. « Il semble endormi », avait commenté le cardinal Sodano, secrétaire d’Etat, et tous étaient frappés par ce visage sur lequel on pouvait lire la paix sereine et le doux sourire, à peine éteint, qui avait caractérisé le Bon Pape. La nouvelle ne fut révélée que deux mois plus tard, le 24 mars, et la presse cria au miracle, mais devait préciser aussitôt le Père Ciro Benedettini, vice directeur de la salle de presse du Vatican : C’est, il est vrai, un événement très rare, mais rien ne permet de déclarer qu’il s’agit d’une intervention surnaturelle... Il peut aussi trouver une explication scientifique. »
Explication que nous lisons dans le quotidien Avvenire du 5 juin : « Aussitôt après sa mort, le Pr. Gennaro Goglia, aujourd’hui âgé de 88 ans et présent, ce 3 juin, Place Saint-Pierre, avait injecté dans le corps du pape Roncalli douze litres d’un liquide anti- décomposition, grâce auquel le visage et le corps du bienheureux sont apparus intacts lors de la reconnaissance canonique. »
De nombreux cas de non-corruption honorent l’histoire de la sainteté dans l’Eglise : rappelons le corps de sainte Bernadette Soubirous, conservé dans l’église du monastère de Nevers ; les mains et les yeux de sainte Catherine Labouré, conservés à Paris ; la langue de saint Antoine, retrouvée intacte par saint Bonaventure ; le cerveau du bienheureux Francesco Faa, mathématicien, architecte et ingénieur, conservé à Turin... Mais, soulignait Jean-Paul II dans son homélie de la Pentecôte, « le don le plus précieux que le Pape Jean XXIII ait laissé au Peuple de Dieu a été lui-même, c’est-à-dire son témoignage de sainteté ». Et d’évoquer ce que le bon Pape disait lui-même des saints : « Chacun d’eux est un chef-d’œuvre de la grâce du Saint Esprit .» Et pensant aux martyrs et aux pontifes ensevelis à Saint-Pierre, il ajoutait des paroles que nous écoutons avec émotion aujourd’hui :  Parfois les reliques de leurs corps sont réduites à peu de choses, mais toujours palpitent ici leur souvenir et leur prière. » Et il s’exclamait : « Oh saints, saints du Seigneur, qui partout nous réjouissent, nous encouragent et nous bénissent. »
Aujourd’hui les dépouilles du bienheureux Pape Jean XXIII reposent dans une châsse de verre, protégée par une grille, le visage et les mains recouvertes d’un léger masque de cire, le corps revêtu des habits pontificaux, une croix sur la poitrine. Devant cette tombe, devenue relique, les fidèles défilent, depuis dimanche 3 juin, seuls ou en groupes compacts, pour remercier le bon pape de les avoir délivrés d’une maladie ou aidés dans des moments difficiles. D’autres évoquent la rencontre personnelle avec le pape. « Nous nous sommes mariés en 1959, raconte un couple de Bergame, pays natal de Jean XXIII, et nous sommes venus en voyage de noces à Rome. Nous étions parmi la foule, comme aujourd’hui et le pape nous a aperçus et nous a salués. Aujourd’hui, anniversaire de notre voyage de noces, nous sommes venus le saluer, une fois encore... »

L’Héritage de Jean XXIII

Dans son homélie, Jean-Paul II a relié le fête de la Pentecôte 2001 à la Pentecôte du Concile Vatican II, ouvert par Jean XXIII. En voici de brefs extraits.

« Aujourd’hui, en notre temps comme au Cénacle de Jérusalem, l’Eglise est traversée par un vent puissant. Elle expérimente le souffle de l’Esprit qui l’ouvre à l’évangélisation du monde.»
Et de citer les paroles de Jean XXIII lui-même à propos de cet élan missionnaire : « L’Eglise, disait-il, naît missionnaire parce qu’elle naît du Père qui a envoyé le Christ dans le monde ; elle naît du Fils qui, mort et ressuscité, a envoyé les Apôtres à toutes les nations ; (elle naît) de l’Esprit Saint qui leur inspire la lumière et la force nécessaires pour réaliser cette mission...
Le Saint Esprit, a-t-il poursuivi, peut être appelé avec raison le protagoniste du Concile Vatican II... Accueillie comme une voix intime venue d’en haut et résonnant dans son esprit, cette brise légère est devenu un vent puissant, l’événement conciliaire a pris la forme d’une nouvelle Pentecôte... et si aujourd’hui nous évoquons cette singulière saison de l’Eglise, c’est parce que le Grand Jubilé de l’An 2000 s’est situé dans la continuité du Concile Vatican II et en a repris les nombreux aspects de doctrine et de méthode.
Aussi, a poursuivi le Pape, « si l’évangélisation requiert la sainteté, celle-ci a besoin, à son tour, de la sève de la vie spirituelle... de la vie personnelle et profonde dans l’Esprit. Comment ne pas rappeler, à ce propos, le riche héritage spirituel que nous a laissé le bienheureux Jean XXIII dans son Journal de l’âme ? Dans ces pages, on peut admirer de près l’engagement quotidien avec lequel, dès ses années de séminaire, il voulut correspondre à l’action de l’Esprit Saint. Il s’est laissé façonner par cet Esprit jour après jour, cherchant à se conformer, avec patience et ténacité, à sa volonté. C’est là que réside le secret de la bonté avec laquelle il a conquis au Peuple de Dieu tant d’hommes de bonne volonté. »

Updated on 06 Octobre 2016