Le p. Lombardi, s.j., la voix du Pape

16 Juin 2006 | par

Comment êtes-vous devenu le directeur de Radio Vatican ?
A la fin de mes études je m’orientais plutôt vers l’enseignement. Je suis mathématicien de formation. Mais lorsque j’étais étudiant en Allemagne, on m’a demandé de collaborer avec La Civiltà Cattolica , une revue italienne de philosophie jésuite qui explore les problèmes de société par de longs articles de fond. Quand je suis rentré en Italie, j’ai continué à travailler pour la rubrique Sciences et Sociétés de la revue. J’avais une grande connaissance des questions des énergies nucléaires : nucléaire et pacifisme. Par la suite, je me suis intéressé à la politique italienne. Plus tard, j’ai été nommé vice-directeur de la revue. J’y suis resté 11 ans jusqu’à ce que je devienne Provincial des Jésuites en Italie, de 1986 à 1990, une charge évidemment très différente.
Enfin, au début des années 90, je suis revenu vers les médias et la communication puisque j’ai été nommé directeur des programmes de Radio Vatican avant d’en devenir le directeur à la fin de l’année 2005. J’ai également en charge, depuis 2001, le centre de télévision du Vatican.

En quoi consiste votre mission ?
La mission de la Radio est tout simplement d’informer sur les activités du Pape et d’offrir un regard chrétien sur le monde, sur l’actualité internationale. C’est un service d’union, à travers une immense diversité culturelle. Au sein de la radio il existe une quarantaine de services : nos programmes sont diffusés en quarante langues différentes, du français en passant par le slovène, le chinois, l’allemand ou le brésilien… De  multiples réalités culturelles sont représentées chez nous. Mais nous avons un objectif commun, servir le Pape. Mon travail est de garantir une unité dans cette variété, une unité au service du Pape et de l’Eglise. Je dois veiller à ce que les programmes de la radio rendent compte positivement des positions du Pape. L’objectif est d’expliquer le message du Saint-Père. Qu’il s’agisse de politique, d’éthique ou de morale, nous devons rendre son message accessible au plus grand nombre. Il est vrai que certains critiquent un manque de liberté au sein de la radio mais dire ce que dit le Pape, c’est le cœur de notre mission. Si nous existons, c’est pour et par cette fonction. Je demande à mes collaborateurs d’être loyaux envers le Saint-Siège. Je suis responsable devant la secrétairerie d’Etat du Vatican à qui je rends régulièrement des comptes.

Au jour le jour, vous assumez aussi des tâches concrètes, en plus de cette supervision éditoriale…
Je dois faire face à de nombreux problèmes d’organisation. Comment recruter le personnel ? Il y a 400 journalistes à la radio. Je suis en contact permanent avec les évêchés du monde entier. Quand les candidats sont européens,
il n’y a évidemment aucun problème. Mais les candidats africains ou indiens, par exemple, ont plus de mal à obtenir un visa. Je dois les aider et plaider régulièrement auprès de l’administration italienne.
Et puis une partie de mon travail consiste à suivre l’évolution technologique. C’est très important. Depuis que je suis arrivé à la radio, il y a quinze ans, j’ai vu des changements incroyables. Nous sommes passés des machines à écrire au “tout informatique”, de l’analogique au numérique, des ondes courtes au satellite et à l’Internet. Nous mettons aujourd’hui à la disposition de nos auditeurs la technologie des PODCAST, ce qu’il y a de plus moderne en matière d’écoute numérique. Chaque jour, je me demande comment, au mieux, porter la voix du Pape dans le monde. Grâce à la technologie, il y a de nouvelles routes.
Il faut les emprunter. Etre mobile. Suivre ce monde en évolution. C’est ma responsabilité de directeur.

Une responsabilité confiée à un père jésuite. Le premier directeur, au début du siècle était déjà membre de la Compagnie de Jésus…
En effet, il s’agissait d’un grand savant. Un explorateur réputé en Italie. Pie XI lui a confié la responsabilité de la radio, car à l’époque il était important de confier ce nouvel outil de communication à un homme de technique et de technologie. Et puis, Pie XI a toujours accordé beaucoup de confiance aux Jésuites. D’autant que la Compagnie de Jésus est un Ordre international, ce qui facilitait la création d’une radio internationale. Aujourd’hui, les Jésuites se proposent de guider la radio. Cela figure dans les statuts de la radio. Mais à l’origine nous n’avions pas de statut particulier. Seuls des Jésuites y travaillaient, c’était une tradition. Après la Seconde Guerre mondiale, la radio s’est ouverte aux laïcs, notamment dans les programmes des pays de l’Est, sous le joug communiste. La demande est devenue très forte pour les auditeurs de ces pays.

En quoi la spécificité des Jésuites permet-elle de guider la radio du Vatican ?
Notre mouvement est très hétérogène. Notre racine commune est la spiritualité ignatienne (1). Mais nous assumons tous des charges bien différentes. Notre vocation est de dépasser les frontières, au sens propre comme au figuré. Nous avons donc une grande faculté d’adaptation, pour répondre au besoin de l’Eglise dans le monde. Nous avons l’habitude d’exercer cette vocation d’universalité. Ici à la Radio, nous sommes en contact avec le monde entier. Radio Vatican est certes un tout petit monde, mais dans lequel on vit l’universalité. Nous avons également fait vœu d’obéissance. Un vœu qui nous est très cher, à nous Jésuites.

Comment présenter le charisme de la compagnie de Jésus aujourd’hui au sein de l’Eglise ?
Notre spiritualité ignatienne lie notre expérience quotidienne à notre foi. Nous rendons des services concrets au quotidien, nous menons des missions dans toutes les directions du monde : éducative, pastorale, culturelle, sociale… Nous pouvons nous rendre partout, et nous sommes d’ailleurs présents sur toute la planète. Moi-même, si mon supérieur me demandait par exemple, demain, de me rendre en mission à Madagascar, je partirais immédiatement et avec enthousiasme. Si on me demande dorénavant de confesser quotidiennement les fidèles d’une paroisse romaine, je le ferais également. Je suis prêt à tout changer du jour au lendemain. C’est un état d’esprit jésuite, je crois. Je me souviens, quand j’étais Provincial des Jésuites d’Italie, un jour, pour des raisons de sécurité j’ai fermé une maison de la Compagnie devenue trop vétuste. Mais j’étais préoccupé par la situation d’un Frère âgé, il avait au moins 80 ans et occupait les lieux depuis des années. J’étais un peu gêné, mais bien obligé de le déloger. Je lui ai alors expliqué la situation. Et à ma grande surprise il n’a exprimé aucune réticence à déménager, à changer un quotidien auquel il était habitué depuis 50 ans. Voilà ce qu’il m’a dit : « Partir ? bien sûr ! C’est notre vocation ».

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1) De Saint Ignace de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus (1491-1556).

 

QUESTIONNAIRE DE SAINT ANTOINE

Quelle image avez-vous de saint Antoine de Padoue ?
Pour moi Saint Antoine est un immense prédicateur et un grand européen. J’admire la fascination qu’il a exercé sur le peuple. Un charisme très fort. Un enthousiasme très chaud. Une exception.


Connaissez-vous Padoue ? Quel souvenir en gardez-vous?
Pour moi, Padoue est le lieu d’une présence jésuite. Une présence universitaire notamment. Quand j’étais Provincial de la Compagnie de Jésus en Italie, j’ai décidé d’envoyer nos étudiants en Philosophie à Padoue. Jusque là, ils suivaient leurs études à Naples. Mais pour des raisons pratiques, j’ai décidé de délocaliser leur centre d’apprentissage. D’autant que l’Université d’Etat de Padoue proposait une collaboration avec la Compagnie de Jésus. Une forme d’échanges de bon services. J’y ai vu un vu point positif.


Quand vous sentez-vous le plus proche de Dieu ?
C’est une bonne question (silence). Dans l’absolution de la confession.


Où puisez-vous votre force ?
(Sourire) Dans l’appel de Dieu. Un jour j’ai été appelé. La vocation est donc ma force. 


Comment priez-vous ?
Maintenant, c’est plutôt une présentation à Dieu, une présentation des problèmes que je rencontre chaque jour, liés aux rencontres que je fais, à tous les échanges de ma vie. 


Qu’est-ce qui vous a rendu le plus heureux cette année ?
Je crois que c’est la visite du Pape à la radio cette année, au mois de mars à l’occasion du 75e anniversaire de Radio Vatican. Benoît XVI est resté plusieurs heures dans nos locaux. Il a pris le temps de rencontrer le personnel. C’est un encouragement primordial pour notre travail.

Updated on 06 Octobre 2016