L’EGLISE AUPRÈS DES SOUFFRANTS

01 Janvier 1900 | par

Frère Jérôme est parisien, originaire d’une paroisse de 17e arrondissement. En classe de Première, il ressent l’appel du Seigneur, lui disant : « J’ai besoin de toi ». Mais ce n’est pas encore bien défini ; il lui semble que c’est plutôt un appel pour être prêtre. Au moment d’entrer au séminaire, Jérôme recule. Parallèlement, il fait des études de Droit à l’université parisienne de Malakoff. Toujours très sensible à la vie de l’Eglise, il prend contact avec sa paroisse et s’y engage, comme animateur liturgique. Professionnellement, il exerce le métier de gestionnaire de copropriété pendant six ans.
Il poursuit son activité paroissiale et sans cesse l’appel de Dieu se fait entendre en lui. Il abandonne alors l’idée d’être prêtre mais souhaite toujours s’engager pour répondre à cet appel du Seigneur.

Le «déclic» «Un pèlerinage en Terre Sainte en 1993, explique Frère Jérôme, puis la rencontre avec un religieux de Saint-Wandrille m’ont fait prendre conscience que j’avais une vocation de religieux. J’ai ressenti la joie que dégageait ce

religieux. Je conservais cependant une réticence à entrer chez les bénédictins car j’avais besoin de contacts et me voyais mal entièrement contemplatif. Par l’intermédiaire d’un ami, j’ai découvert l’existence des Frères de Saint Jean-de-Dieu. Cela a été un déclic. J’ai compris qu’il existait des Frères qui avaient une mission apostolique, notamment auprès des malades, des handicapés. Cela rejoignait ce que j’avais connu avec ma mère, qui faisait partie des Dames de la Charité de Saint Vincent de Paul.»
Ensuite, tout va très vite. Jérôme fait un stage à Marseille, dans une maison de retraite dont sont responsables les Frères de Saint Jean-de-Dieu, dans le service de gérontopsychiatrie. Le soir même, il est convaincu que sa vocation est là. «Ce qui est très beau, c’est cette grâce qu’ont les Frères de redonner aux personnes âgées une dignité. Elles prennent un visage humain grâce à eux.»
A l’âge de 32 ans, il s’engage : «Si mon cheminement fut long – j’ai beaucoup prié pour savoir où Dieu me voulait – une fois le choix fait, je n’ai plus reculé.»
Jérôme en parle au maître de formation, et lui écrit. Sa demande est acceptée. Il fait son postulat, d’une durée d’environ six mois, à Marseille. C’est alors qu’il découvre la vie communautaire. En plus de sa formation théologique, il travaille une partie de la journée au service des personnes âgées.

Une autre facette : la mission Ensuite, pendant deux ans, Jérôme fait son noviciat. La deuxième année, pendant sept mois, il est envoyé au Togo, en Afrique Noire, dans l’hôpital Saint Jean-de-Dieu : « J’ai découvert là une autre facette de notre charisme, la mission. » A la fin de ce noviciat, il fait profession de vœux temporaires. Aux trois vœux classiques des religieux – chasteté, pauvreté, obéissance –, s’ajoute celui d’hospitalité. Les Petites Sœurs des Pauvres ont aussi ces quatre vœux.
Depuis un peu plus d’un an, Frère Jérôme est scholastique. Le scholasticat dure cinq ans. «Nous approfondissons, la première année, les études théologiques et spirituelles. Exceptionnellement, je travaille trois matinées dans un des services de la clinique, pour ne pas perdre le fil.»
Ensuite, les autres années sont plus axées sur la formation professionnelle. «Avec l’accord de mes Supérieurs, je vais essayer de me préparer à être infirmier. Cette année, je passe des concours pour accéder à cette formation. A la fin du Scolasticat, je prononcerai mes vœux perpétuels.»

La clinique Nous nous promenons dans la clinique. L’accueil est un espace chaleureux, le portrait de saint Jean de Dieu trône en place de choix. Un joli petit jardin, avec une Vierge protectrice, sépare le hall d’entrée de l’hôpital proprement dit. Le service d’urologie reçoit une vingtaine de patients à ce moment-là, passant un examen ou attendant des résultats d’analyse. Pour l’ensemble de la clinique, qui comprend différents services (gynécologie, urologie, ophtalmologie...), une trentaine de chirurgiens travaillent et ont à leur disposition quatre blocs opératoires.
Revenons à la visite. Soixante-six chambres, sur trois étages. Clarté et propreté caractérisent ces lieux. A chaque étage, un petit endroit salon, pour permettre aux malades et à leurs familles de se changer les idées et de prendre un petit café.
Un endroit de souffrance cependant. Beaucoup de personnes atteintes d’un cancer se font opérer dans cette clinique. Les Frères, médecins, infirmiers, aide-soignants, soignent et sont à l’écoute du malade. Ils développent, avec leurs compétences propres, un réel charisme de compassion. La durée d’hospitalisation de la plupart des patients reste relativement courte, rarement au-delà de quinze jours. Ici, l’on ne trouve pas de mourants. « Nous n’avons pas d’unité de soins palliatifs pour cette raison, souligne le Frère Jérôme. La clinique est spécialisée, à la pointe de la technique chirurgicale. Les malades viennent ici pour y subir une intervention, et repartent après.»

Le message de Frère Jérôme Par la compassion et les soins, les Frères essaient de dire aux malades qu’à travers eux, quelqu’un les aime encore davantage. C’est une vie entièrement tournée vers l’autre. « Cela me semble important, souligne Frère Jérôme, à l’heure où l’on privilégie le mot humanitaire sur le mot charité. Ce que nous voulons, c’est nous engager auprès des personnes souffrantes dans la durée, avec pour modèle le Christ. Il faut d’abord avoir confiance en soi, en la grâce qui nous est faite, et à un moment particulier, tout donner pour suivre l’Appel du Christ. Comme le Christ l’a souvent dit à ses disciples, je retiens : N’ayez pas peur !...»
Un message de foi et d’espérance universel, que le pape Jean-Paul II ne cesse de rappeler.

Saint Jean de Dieu

1495 : naissance de Juan Ciudad, à Montemor-o-novo, au Portugal.
1503 :
à l’âge de 8 ans, dans des circonstances mystérieuses, il quitte sa famille.
1523 :
il devient soldat.
1538 :
sa vie d’errances, de voyages, de fuites, l’emmène jusqu’à Grenade, en Espagne, où il s’installe comme libraire d’ouvrages de piété.
A partir de 1539 :
il commence à s’occuper des personnes les plus démunies de son temps, les malades mentaux, les souffrants, les prostitués, les abandonnés, les pauvres qui n’avaient aucun moyen de vivre. Il regroupe quelques lits. C’est sa première « maison d’accueil ». Dès le début, il est aidé par deux laïcs. Il sait écouter, être confident, conforter, et c’est là l’une des clés de sa réussite auprès des personnes malades mentales.
8 mars 1550 :
mort de Jean de Dieu.
21 septembre 1630 :
béatification.
16 octobre 1690 :
canonisation.

 

L’Ordre dans le monde

Aujourd’hui l’Ordre est riche de 26 provinces constituées, sur les 5 continents, englobant quelque 217 maisons, hôpitaux généraux et psychiatriques, cliniques, sanatoriums, refuges pour personnes âgées, instituts médicaux pédagogiques, maisons pour le traitement des infirmes, accueils de nuit, etc... Il a même le grand honneur de veiller au Vatican sur la précieuse santé du Chef de l’Eglise, dans le rôle d’infirmier pontifical et de tenir la pharmacie de ce petit Etat.
L’ordre dénombre environ 1500 frères et présente cette particularité d’être uniquement hospitalier. Ainsi, depuis quatre siècles, les frères perpétuent l’œuvre de celui qui fut leur père, le «Père des pauvres et des malades». L’unique ambition de l’Ordre est de «Faire le bien», comme le demandait le mendiant héroïque de Grenade. La devise de leur Ordre ne tient-elle pas dans ce seul mot, mais qui dit tout : « Caritas».
Le Frère José Luis Redrado Machite vient d’être ordonné évêque par le Pape. Il assure la responsabilité de Secrétaire du Conseil Pontifical pour la Santé.

L’arrivée de l’Ordre en France

Devenue l’épouse du roi Henri IV à la fin de l’année 1600, Marie de Médicis, nièce du Grand Duc de Toscane, avait vu les hospitaliers à l’œuvre dans son pays. Avec l’autorisation du roi de France, elle obtint du Supérieur général l’envoi à Paris de 6 religieux ayant pour mission d’y fonder un hôpital semblable à ceux que l’Ordre possédait à Rome et à Milan. Leur premier hôpital, nommé « Hôpital de la Charité », fut bâti au carrefour du boulevard Saint-Germain et de la rue des Saints-Pères, à l’emplacement de l’actuelle faculté de Médecine. Telle fut l’origine du premier hôpital devenu célèbre sous le nom de « La Charité ». La succession des différents monarques français au pouvoir laisse lieu à la création d’œuvres de charité de toutes sortes et généralement « plagiées » sur l’œuvre du Saint fondateur. La Révolution anéantit complètement la florissante province. Mais elle renaîtra moins de trente ans après, et les annales des Frères de Saint Jean-de-Dieu de la province de France s’enrichirent de chapitres nouveaux.

 

Les établissements en France

Les communautés de la province de France s’occupent de malades, de handicapés, mais aussi de sans domicile fixe et personnes âgées. Citons quelques-unes de leurs maisons:
Paris (7e) Maison de Santé Saint-Jean-de-Dieu. Clinique chirurgicale.
• Paris (15e) Œuvre des jeunes handicapés. Centre de rééducation fonctionnelle.
• La Villetertre (Oise) Centre d’aide par le travail et foyer d’hébergement Saint-Jean-de-Dieu de la Villetertre
• Dinan (Côtes-d’Armor) Centre hospitalier spécialisé Saint-Jean-de-Dieu de Léhon - Dinan. Psychiatrie.
• Le croisic (Loire-Atlantique) Centre Saint-Jean-de-Dieu du Croisic. Centre pour des personnes handicapées.
• Marseille (Bouches-du-Rhône) Œuvre hospitalière Saint-Jean-de-Dieu de Marseille/Saint-Barthélémy. Maison de retraite spécialisée.
• Marseille (Bouches-du-Rhône) Accueil de nuit Saint-Jean-de-Dieu de la rue Forbin. Centre d’hébergement d’urgence.
• Saint François (Ile de la Réunion) Association Saint-Jean-de-Dieu. Centres d’aide par le travail. Foyers d’hébergement. Institut médico-professionnel.
• Plamplemousses (Ile Maurice) Œuvre hospitalière Saint-Jean-de-Dieu. Maison d’accueil et de retraite médicalisée.

Updated on 06 Octobre 2016