L'espérance chrétienne

On attendait une encyclique sociale, qui décline en actes celle de 2006 consacrée à la charité. Finalement elle devrait paraître au premier trimestre 2008. C’est un texte théologique, consacré à l’espérance chrétienne, que Benoît XVI a voulu publier d’abord.
Dans son introduction, le Pape explique : « le présent, même un présent pénible, peut être vécu et accepté s’il conduit vers un terme et si nous pouvons être sûrs de ce terme, si ce terme est si grand qu’il peut justifier les efforts du chemin ».

Un monde imparfait
« Les temps modernes ont fait grandir l’espérance de l’instauration d’un monde parfait qui, grâce aux connaissances de la science et à une politique scientifiquement fondée, semblait être devenue réalisable », écrit Benoît XVI, qui évoque « les deux étapes essentielles de la concrétisation politique de cette espérance » : la Révolution Française et le Marxisme.
La première est la « tentative d’instaurer la domination de la raison et de la liberté, maintenant aussi de manière politiquement réelle. » Puis, « Après la révolution bourgeoise de 1789, l’heure d’une nouvelle révolution avait sonné, la révolution prolétarienne », explique le Pape. Mais la grande erreur de Marx, souligne Benoît XVI, a été le matérialisme : « En effet, l’homme n’est pas seulement le produit de conditions économiques, et il n’est pas possible de le guérir uniquement de l’extérieur, créant des conditions économiques favorables ».

L’ambiguïté du progrès
Le christianisme ne rejette pas le progrès, mais il refuse d’en faire une nouvelle religion. Le Pape revient là, expliquait le cardinal suisse Georges Cottier en présentant l’encyclique, à « l’un de ses thèmes de prédilection sur le lien entre foi et raison, à savoir que la raison ne devient véritablement humaine que si elle est capable de regarder au-delà d’elle-même ». LePape écrit : « Le progrès offre de nouvelles possibilités pour le bien, mais il ouvre aussi des possibilités abyssales de mal – possibilités qui n’existaient pas auparavant. » Donc, « Si au progrès technique ne correspond pas un progrès dans la formation éthique de l’homme, dans la croissance de l’homme intérieur alors ce n’est pas un progrès, mais une menace pour l’homme et pour le monde. »

Une promesse au présent
« Si la Lettre aux Hébreux dit que les chrétiens n’ont pas ici-bas une demeure stable, mais qu’ils cherchent la demeure future, cela est tout autre qu’un simple renvoi à une perspective future », écrit Benoît XVI. De fait, « la société présente est considérée par les chrétiens comme une société imparfaite ; ils appartiennent à une société nouvelle, vers laquelle ils sont en chemin et qui, dans leur pèlerinage, est déjà anticipée. »
Ainsi, « la promesse du Christ n’est pas seulement une réalité attendue, mais une véritable présence : Il est vraiment le “philosophe” et le “pasteur” qui nous indique ce qu’est la vie et où elle est. »

Pratiquer l’espérance
Benoît XVI indique ensuite comment apprendre et pratiquer l’espérance. Le premier lieu de cet apprentissage est la prière : lorsque plus personne ne m’écoute, Dieu m’écoute, si plus personne n’est en mesure de m’aider, Lui le peut encore. La souffrance permet également d’approcher l’espérance. Il faut bien sûr faire tout ce qui est possible pour la diminuer, mais ce n’est pas le fait de fuir la souffrance qui guérit l’homme, mais sa capacité à accepter l’épreuve.
Enfin, le Pape évoque le Jugement dernier : « L’image du Jugement final est en premier lieu non pas une image terrifiante, mais une image d’espérance » qui « appelle à la responsabilité ».

Des “maîtres” à imiter
Au fil de ce texte, le Pape propose quelques figures de l’Eglise de notre temps pour “aider à comprendre“ ce que signifie l’espérance.
Parmi celles-ci, le Cardinal vietnamien Van Thuan, qui a passé 13 ans dans les prisons communistes vietnamiennes, dont 9 ans à l’isolement, et qui est l’auteur des “prières d’espérance“.
Le Pape rappelle aussi l’Africaine Joséphine Bakhita, canonisée en octobre 2001. Enlevée à l’âge de 7 ans au Soudan « par des marchands d’esclaves, battue jusqu’au sang », Bakhita a finalement été emmenée en Italie, après 13 ans passés au service de « maîtres cruels ». Là, explique le Pape, elle a « non seulement la petite espérance de trouver des maîtres moins cruels, mais la grande espérance » d’être « une fille de Dieu libre ». Elle sera baptisée avant de devenir religieuse canossienne.
« Au long des jours, écrit Benoît XVI, l’homme a de nombreuses espérances – les plus petites ou les plus grandes –, variées selon les diverses périodes de sa vie. (…) Cependant, quand ces espérances se réalisent, il apparaît clairement qu’en réalité ce n’était pas la totalité. Il paraît évident que l’homme a besoin d’une espérance qui va au-delà. Il paraît évident que seul peut lui suffire quelque chose d’infini, quelque chose qui sera toujours plus que ce qu’il ne peut jamais atteindre. »

Encycliqye
C’est une lettre du pape portant sur un point de doctrine, de morale, de spiritualité, de pastorale ou de discipline. Elle est adressée aux évêques, aux prêtres et aux diacres, aux personnes consacrées et à tous les fidèles laïcs. Son titre vient en général de ses premiers mots en latin.

Rachetés par l’amour
Ce n’est pas la science qui rachète l’homme. L’homme est racheté par l’amour. Cela vaut déjà dans le domaine purement humain. Lorsque quelqu’un, dans sa vie, fait l’expérience d’un grand amour, il s’agit d’un moment de “rédemption” qui donne un sens nouveau à sa vie.
Mais, très rapidement, il se rendra compte que l’amour qui lui a été donné ne résout pas, par lui seul, le problème de sa vie. Il s’agit d’un amour qui demeure fragile. Il peut être détruit par la mort. L’être humain a besoin de l’amour inconditionnel. Il a besoin de la certitude qui lui fait dire : « Ni la mort ni la vie, ni les esprits ni les puissances, ni le présent ni l’avenir, ni les astres, ni les cieux, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est en Jésus Christ » (Rm 8, 38-39).

In Spe Salvi