Petite assemblée aux dimensions du monde

01 Janvier 1900 | par

François et son idéal de pauvreté, petite semence jetée en terre en 1209 lors de la naissance de l’Ordre des Frères Mineurs, est devenue une plante aux multiples branches, avec la fondation de l’Ordre des Pauvres Dames (Clarisses) et de l’Ordre de la Pénitence ou Tiers-Ordre. Ce dernier a inspiré, à son tour, d’innombrables congrégations d’hommes et de femmes, désireux de rayonner l’idéal de François par la vie commune et le service des pauvres. Ce fut aussi la rencontre d’une tertiaire franciscaine, Angéla Maria del Giglio et d’un Frère Mineur de la famille conventuelle, le Père Giuseppe Antonio Marcheselli, qui fut à l’origine de la Famille des Franciscaines Missionnaires d’Assise.

La route vers Assise
Ni l’un ni l’autre n’étaient nés à Assise, mais tous deux, originaires du Nord de l’Italie, devaient s’y rencontrer au début de 1702. La première naquit à Vicenza en 1658. En 1673, à la mort de sa mère, elle se charge de la l’éducation de ses frères et s’établit à Assise en 1689. Le second, né à Crémone en 1676, entre chez les Frères Mineurs conventuels à Bologne, est ordonné prêtre à Ravenne en 1699, rejoint, en 1701, la communauté du Sacro Convento d’Assise et prêche le carême 1702 dans la basilique Saint-François. Antoine et Angéla sont animés d’une même ambition : revenir aux origines de l’Ordre franciscain et de l’Eglise, en vivant, comme François, à l’exemple du Christ pauvre et serviteur de tous.
Dès 1702, le père Antoine suggère à Angéla d’ouvrir une école pour la formation humaine et chrétienne des enfants et des jeunes filles d’Assise et, tout en appartenant à la fraternité de la Basilique, ils s’occupent de la Maison où vivent en communauté un petit groupe de Tertiaires, et qu’ils désignent sous l’appellation de petite assemblée. Naissent ainsi les Sœurs del Giglio, du nom de leur fondatrice, nom qu’elles conserveront jusqu’aux années 80, lorsqu’elles prendront la nouvelle dénomination de Sœurs Franciscaines Missionnaires d’Assise.

Quatre piliers de spiritualité franciscaine actuelle

Une étude menée par une sœur japonaise, Kyesun Seo, nous guide à travers les quatre étapes du chemin spirituel de la Congrégation, née il a trois cents ans, mais toujours étonnante de vitalité : pénitence-conversion, œuvres de miséricorde, pauvreté, vie fraternelle en communauté.
Pénitence-conversion. Ces mots évoquent aux yeux du profane austérité et renoncement et le signifient réellement, car pour trouver Dieu, aimer lui seul, répondre à son amour et parvenir à sa ressemblance, il faut renoncer à soi-même et à tout ce qui n’est pas Dieu. François a embrassé le lépreux pour mieux rencontrer le Christ... Et la joie qui rayonne sur le visage des jeunes filles et des femmes qui le pratiquent signifient qu’elles ne cherchent pas la mort mais la vie.
Œuvres de miséricorde. L’expression, ancienne mais toujours actuelle, renvoie à cette autre dimension de l’amour de Dieu qu’est l’amour du prochain. « Que l’on ne manque pas de secourir des pauvres autant que l’on peut, écrit le père Antoine Marcheselli dans son Commentaire de la règle du Tiers-Ordre de saint François. Que l’on console quelque famille pauvre en donnant tout en une fois. Il ne faut pas donner un peu à chacun, mais tout à peu de gens, afin de les soulager. Donner peu à tout le monde signifie ne soulager personne. »
Aussi les Sœurs Franciscaines Missionnaires d’Assise se consacrent-elles aux enfants, aux malades, aux prisonniers... aux victimes du sida en Afrique et en Amérique latine.
Pauvreté. Etre pauvre signifie, selon François, rester devant Dieu les mains vides. Reconnaître que tout vient de lui, l’aimer comme unique Père qui prend soin de nous : Désormais, avait dit François devant l’évêque d’Assise, je n’appellerai plus mon père Pierre de Bernardone, mais mon Père qui est aux cieux...
Vie fraternelle en communauté. Mais découvrir Dieu-Père, c’est aussi rencontrer des frères et leur pardonner. Selon le père Antoine Marcheselli, la vie en communauté s’exprime surtout par la pratique continuelle du pardon à l’égard des frères. Aussi disait-il : « Cette Maison est pour les âmes qui cherchent uniquement Dieu... Je voudrais répéter cela un million de fois, afin de bien le graver dans votre esprit et dans votre coeur. »

Trois siècles d’histoire

Humble semence, débuts difficiles, alternance de réussite et d’échecs : c’est ainsi que l’on pourrait résumer les trois cents ans de vie des Franciscaines Missionnaires d’Assise.
La petite assemblée débute, en effet, dans un logement en location. Pour vivre, elles travaillent chez les familles d’Assise, s’occupent du linge et des vases sacrés de la Basilique Saint-François et le sort de la Congrégation est confié au Custode (Supérieur) du Sacro Convento.
En 1793, une aide exceptionnelle d’un prélat napolitain empêche la petite assemblée de sombrer. En 1810, l’occupation napoléonienne confisque tous les biens des Tertiaires del Giglio, mais les religieuses continuent d’assurer l’école publique des jeunes filles de la ville. « Privées de l’habit religieux, méprisées et humiliées par des ennemis acharnés du bien, nous avons passé ces années dans une mer de misère », lit-on dans l’Histoire du monastère. Dans les années 1816-1818, une disette oblige les religieuses à quêter dans les rues et les campagnes d’Assise.
En 1819, c’est un petit reste de quatre sœurs qui survit, dont deux plus qu’octogénaires, mais entre 1822 et 1841, la Congrégation renaît... pour connaître, en 1867, une nouvelle suppression de la part du jeune royaume d’Italie.
Puis, de 1902 à 1942, les sœurs essaiment en Turquie, en Roumanie, en Albanie, avant d’être chassées par les régimes communistes. Et à partir de 1945, de nouvelles communautés fleurissent en Australie, au Japon, au Brésil, en Zambie, aux Etats-Unis et en Croatie, tandis qu’une sœur coréenne, formée en Italie, fonde une communauté dans son pays d’origine et que les sœurs de Zambie partent en mission au Kenya. En 1996, une communauté internationale est fondée aux Philippines, dans la périphérie de Manille...
Aujourd’hui, leur mission continue auprès d’enfants, de jeunes filles, d’handicapés et de malades. Parmi elles, mes propres soeurs, dont l’une, ancienne missionnaire en Australie, traverse l’épreuve de la maladie, amoureusement assistée par sa soeur cadette.

1 Les informations contenues dans cet article sont extraites du livre du père Giuseppino di Roma, Assisi, incontri che si fanno storia (Des rencontres qui font l’histoire), publié aux Editions du Messaggero Padova, à l’occasion du troisième centenaire de la fondation des Sœurs Missionnaires d’Assise

 

Updated on 06 Octobre 2016