Une pastorale d'écoute et de rencontre

01 Janvier 1900 | par

Quel est le rôle d'un sanctuaire comme la Basilique Saint-Antoine de Padoue ? Comment répondre aux attentes des pèlerins et favoriser leur rencontre avec Dieu ? Le Père Domenico Carminati, nouveau Recteur de la Basilique, nous livre ses réflexions et ses projets.

Vous êtes Recteur de ce sanctuaire depuis quelques mois seulement. Qu'est-ce qui vous a le plus frappé en arrivant dans ce haut lieu aux dimensions internationales?

Ce qui m'a le plus frappé dans mon premier contact avec la Basilique, c'est l'extraordinaire affluence des pèlerins et la fréquentation assidue du sacrement de réconciliation, aux moments forts de l'année : Noël, Pâques, etc. Et quand je dis assidue, je ne me réfère pas au nombre des participants mais à la qualité de la célébration : dans la plupart des cas, il y a le désir d'une rencontre sincère avec le Seigneur, et les pèlerins prennent pour cela le temps nécessaire. Cela suppose, de notre part, une grande disponibilité pour les accueillir, une préparation théologique et psychologique qui nous rende disposés à l'écoute, prêts au dialogue, capables de répondre à leurs multiples attentes. C'est là, je crois, le ministère spécifique de cette Basilique que Paul VI qualifiait de clinique spirituelle .

Quelle sont, d'après vous, les attentes des pèlerins ? Quelles sont leurs caractéristiques ?

Il y a à la fois un grand besoin de rencontre, mais peu de temps pour la satisfaire. Padoue est située sur les deux axes Nord-Sud et Est-Ouest qui relient le nord et l'ouest de l'Europe au Sud et à l'Est. La visite à la Basilique s'inscrit presque toujours dans un circuit touristique et religieux qui comprend Rome, Venise, souvent aussi Ravenne, et Assise. Pèlerins ou visiteurs ne passent donc ici que deux heures en moyenne. Un temps trop court pour aller au-delà d'une bonne confession et de la célébration de l'eucharistie. En outre, la Basilique ne dispose pas, comme la plupart des lieux de pèlerinage, d'espaces de recueillement et de silence : tout se passe à l'intérieur de la Basilique, et le plus souvent, surtout le dimanche et en été, dans un va-et-vient continuel qu'il n'est pas facile de contenir, même durant les célébrations eucharistiques.

En revanche, nous nous efforçons d'intervenir en amont, chaque fois que cela est possible, pour établir avec les organisateurs et les directeurs de groupes, des horaires et des itinéraires permettant la démarche du pèlerinage et la visite de la Basilique, mais également des moments de réflexion et de silence.

Avez-vous le souci d'approfondir ces démarches des pèlerins et la spiritualité antonienne ? Par quels moyens ?

Nous ne sommes pas équipés pour organiser des cours de catéchèse proprement dits. Il existe, il est vrai, une école de théologie pour laïcs qui délivre un enseignement spécialisé. A côté de cela, nous pensons qu'une célébration digne de la confession et de l'eucharistie sont déjà dans la ligne de la spiritualité de saint Antoine, toute orientée vers la conversion et la rencontre avec le Seigneur. Le vieil adage Per Antonium ad Jesus (Antoine conduit au Christ) n'a rien perdu de sa valeur... Dans le même esprit, nos homélies sont centrées, comme celles d'Antoine, sur l'annonce de la Parole de Dieu ; et plus qu'à développer des thèmes antoniens précis, nous nous attachons à transmettre une sensibilité antonienne faite d'accueil, de miséricorde, d'appels à la conversion, les thèmes qui furent si chers à saint Antoine lui-même.

Pour une connaissance plus directe de saint Antoine, nous disposons de l'Exposition sur la Vie du Saint et du Musée de la Dévotion populaire, tous deux installés dans les cloîtres de la Basilique.

Vous venez du ministère paroissial : comment vivez-vous l'expérience pastorale dans un sanctuaire aux dimensions, pourrait-on dire, universelles ?

Ma première réaction en arrivant ici fut, je l'avoue, de regret et de crainte : regret de ne plus avoir le contact direct avec les chrétiens engagés et les problèmes quotidiens, comme dans une paroisse ; crainte de manquer d'une réelle action pastorale. Mais, bientôt, je me suis aperçu qu'une activité pastorale est possible ici, et avec des caractéristiques bien particulières.

En effet, nous ne faisons pas de catéchèse, nous ne préparons pas aux baptêmes, aux premières communions, aux mariages, ou rarement. De ce point de vue, nous récoltons les fruits de la pastorale des paroisses. En revanche, nous avons la possibilité de consacrer plus de temps à l'écoute des personnes, à leurs problèmes, à leurs richesses intérieures, notamment à travers le ministère de la confession ; alors que dans les paroisses, les prêtres, peu nombreux et surchargés, sont moins disponibles pour une telle écoute. De ce point de vue, des sanctuaires comme celui-ci rendent un réel service aux paroisses et à la pastorale en général, autant au niveau d'une ville que d'une région, d'un pays et même au niveau international, car partout on rencontre ces mêmes problèmes.

Personnellement, non seulement je pense avoir ici une action pastorale, mais mes précédentes expériences en paroisse me rendent sensible et attentif aux problèmes qui se posent dans cette Basilique.

Pour le moment, je n'en suis qu'à mes débuts. Lorsque j'aurai une vision plus claire des différentes réalités, je serai moi-même en mesure de formuler un vrai projet pastoral. Donc, à bientôt !

Propos recueillis par
Valentin Strappazzon 

Updated on 06 Octobre 2016