Sage comme une image ? L’enfance dans l’œil des artistes
Du mythe de l’innocence hérité des Lumières à l’enfant soldat, des princes maudits aux orphelins, des mendiants aux jeunes prodiges et aux écoliers en passant par une grande galerie de portraits peints, sculptés ou photographiés, l’exposition est une plongée dans la représentation de l’enfance entre 1790 et 1850. Depuis le Moyen Âge, les enfants étaient le plus souvent peints comme des adultes en miniature. Mais au tournant du XIXe siècle, le traité d’éducation publié en 1762 par Jean-Jacques Rousseau modifie fondamentalement le regard porté sur l’enfance. Elle est alors présentée comme un moment privilégié d’innocence et d’adéquation à la nature. Les parents ont la responsabilité de l’éduquer. « Chaque enfant qu’on enseigne est un homme qu’on gagne », écrivait Victor Hugo. La Révolution française qui éclate en 1789 améliore le statut des enfants avec, notamment, la suppression du droit d’aînesse. Les représentations artistiques de l’époque reflètent ces évolutions.
Une recherche inédite
Le Portrait d’un jeune garçon de Géricault et le Portrait d’un père de famille avec ses enfants, une peinture anonyme, conservés au musée de Tessé du Mans, sont à l’origine du projet. Les deux tableaux évoquent l’enfance, chacun à leur manière : isolée ou inscrite dans le cadre familial. Trois années de recherches ont été nécessaires pour bâtir cette exposition coorganisée par le musée du Louvre, le musée Tessé du Mans et le MusBA de Bordeaux. Elle fait notamment (re)découvrir des artistes rarement montrés. Ainsi des artistes méconnus parce que femmes, comme Jeanne-Élisabeth Chaudet et Sophie Feytaud-Tavel, ou éloignés des cercles parisiens, comme Auguste de Châtillon, côtoient les plus grands noms : Delacroix, Théodore Géricault, Ingres, Camille Corot, James Pradier et bien d’autres. Ce fut aussi l’occasion de restaurer plusieurs œuvres comme Romulus et Rémus, tableau d’Émile Callande de Champmarti ou encore la sculpture du Jeune aveugle breton d’Étienne-Nicolas Édouard Suc. Cette dernière n’était connue jusqu’ici que par une petite reproduction. L’exposition d’abord présentée au Mans a été enrichie de certaines œuvres du musée des Beaux-Arts de Bordeaux comme la Leçon de labourage de François-André Vincent, Deux Ramoneurs de Sophie Feytaud-Tavel, Giotto dans l’atelier de Cimabue de Jules-Claude Ziegler, une manière de mettre en lumière les riches collections du musée.
Un parcours thématique
À la croisée de différentes disciplines artistiques comme la photographie, la peinture et la sculpture, l’exposition témoigne de l’émergence d’une sensibilité nouvelle pour l’enfant au tournant du XIXe siècle. Les artistes s’attachent alors à saisir toute l’originalité de l’enfance en prenant souvent pour modèles leur propre progéniture ou celle de leurs amis. Le parcours déroule une série de thèmes en reflet avec le contexte historique et social et met en lumière les représentations contrastées de l’enfance : innocence, héroïsme, abandon, éducation, souffrance ou marginalité.
Infos :
Musée des Beaux-Arts de Bordeaux,
jusqu’au 3 novembre
20, Cours d'Albret
33000 Bordeaux
Tél. : +33 (0)5 56 10 20 56
Internet : www.musba-bordeaux.fr