Consoler les affligés

Parmi les nombreuses propositions jubilaires, se tient lundi 15 septembre une proposition particulière : le jubilé de la consolation. Il s’agit de se tourner vers les personnes traversant des situations difficiles, notamment le deuil.
07 Septembre 2025 | par

Si elle n’est pas l’une des plus connues, cette histoire est pourtant l’une des plus émouvantes du pontificat de François. La scène se déroule en avril 2018 et François, comme évêque de Rome, est alors en visite pastorale dans une des paroisses de la ville. Comme d’habitude, un moment de rencontre avec les enfants du catéchisme est prévu. François est assis devant eux, dialogue avec eux, comme un grand-père avec ses petits-enfants. Mais l’un d’eux, Emanuele, n’ose prendre la parole, visiblement ému et peinant à retenir ses larmes. François le remarque et lui dit de venir lui confier à l’oreille ce qui lui pèse visiblement sur le cœur.
Avec l’accord du jeune garçon, François répète leur échange. « Mon père est décédé récemment. Il était athée, mais il avait fait baptiser ses quatre enfants. C’était un homme bon. Papa est-il au paradis ? », interroge ainsi Emanuele. « Dieu a un cœur de père. Et face à un père non-croyant qui a pu baptiser ses enfants et leur transmettre ce talent, pensez-vous que Dieu pourrait le laisser loin de lui-même ? », répond François, consolant visiblement le jeune garçon. « Parle à ton père, prie ton père. »
En quelques mots, le pape François a redonné une espérance à Emanuele. Et consoler ceux qui pleurent, les affligés : tel est le cœur d’un des nombreux rassemblements du Jubilé. Le lundi 15 septembre en effet, se tient le jubilé de la consolation. S’il peut surprendre de prime abord, au milieu de grands rassemblements festifs, cet évènement paraît ensuite comme une évidence : comment le Jubilé de l’espérance ne pourrait-il pas s’adresser directement à ceux qui ont besoin de consolation ? C’est ainsi qu’y sont conviés « tous ceux qui traversent une situation de douleur et d’affliction, pour raison de maladie, deuil, ou pour avoir subi des violences ou abus, ainsi que leurs familles respectives », peut-on lire sur le site Internet officiel du Jubilé.

Une maison accueillante
Au-delà de ce rassemblement jubilaire, nombreux sont ceux qui s’engagent au long de l’année pour œuvrer à la consolation. Anne, par exemple, accompagne les familles endeuillées de sa paroisse pour préparer la cérémonie de funérailles du défunt. « Les familles sont souvent déboussolées et débordées entre toutes les formalités et décisions à prendre dans l’urgence, explique la sexagénaire. Nous leur apportons une aide pratique en leur enlevant une tâche parfois difficile, surtout quand les familles connaissent peu le déroulé des célébrations. Les proches arrivent paniqués et repartent de nos rendez-vous plus apaisés. » Pour elle, son service apporte une première consolation en permettant aux esprits de se reposer un peu. Et il permet aux familles encore dans la douleur de commencer à entrer dans une perspective différente. « Il n’est pas rare que l’on me demande que la cérémonie soit marquée par l’espérance, raconte la bénévole. Nous choisissons alors des chants plus gais et je conseille à l’organiste de ne pas jouer des airs tristes. » Mais surtout, poursuit Anne, « j’essaye de montrer à ces personnes parfois éloignées de l’Église que celle-ci est une maison accueillante, qu’elle est aussi leur maison ». 

Le cœur de l’Évangile
Si la bénévole agit surtout au moment du décès et des obsèques, d’autres mènent leur action sur le temps plus long. C’est par exemple le cas du mouvement Espérance et Vie dont le but est « d’apporter un réconfort moral et spirituel aux personnes dont le conjoint est décédé et qui ont besoin de cet accompagnement ». Présent dans environ 70 diocèses français (sur une centaine), le mouvement, « ouvert à toute personne veuve qui cherche un lieu d’échanges dans l’amitié et un approfondissement spirituel », « permet de garder l’espérance et continuer la vie ». « Je n’avais plus envie de vivre sans mon mari, tout était vide, exprime une veuve dans un témoignage recueilli par le mouvement. Les échanges avec les membres d’Espérance et Vie m’ont beaucoup apporté : j’ai trouvé une chaleur, une écoute bienveillante et un partage (oh combien vivifiant !) d’expériences, douloureuses certes, mais si différentes. »
Les personnes endeuillées peuvent également trouver du réconfort lors de retraites spirituelles dédiées. Le sanctuaire Notre-Dame de Montligeon, par exemple, propose des sessions de « haltes réconfort deuil » sur deux jours ainsi que des « semaines consolation deuil ». « Avec des enseignements sur les étapes du deuil et des temps d’écoute, ces haltes donnent des éléments simples pour apprivoiser le deuil », assure le sanctuaire. La session « m’a donné une ouverture, un apaisement, je me sens plus en confiance », raconte Vania, une participante venue depuis Montréal après le décès de son père. « Ce pèlerinage m’a fait beaucoup de bien, c’est un lieu de fraternité qui nous aide dans la foi », abonde Cathy.
Dans les invités au jubilé de la consolation, le Vatican précise bien que celui-ci s’adresse prioritairement également aux victimes d’abus. Localement, des personnes ou des associations – notamment Comme une mère aimante – s’engagent pour accompagner ces personnes, leur permettre d’avancer dans leur combat pour une justice, sans laquelle l’espérance reste souvent impossible. Le pape Léon XIV s’est déjà fortement exprimé en ce sens. « La douleur des victimes et de leurs familles est aussi notre douleur », a-t-il ainsi déclaré dans un message en juin, appelant à une « profonde conversion ecclésiale », car « la prévention et la guérison ne sont pas une stratégie pastorale : elles sont au cœur de l’Évangile ». Ainsi, consoler les affligés, c’est également prendre soin des victimes d’abus de toutes sortes. 

Updated on 07 Septembre 2025
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