Ensemble, pour le développement, contre la pauvreté

17 Mai 2006 | par

Trois projets en Afrique, dans trois pays particulièrement pauvres et éprouvés : le Ghana, l’Angola et l’Ethiopie. à leur base, la culture du réseau, c’est-à-dire la capacité de mettre ensemble personnes, organisations, ressources pour combattre les causes de la pauvreté. C’est le choix de la Caritas Saint-Antoine pour 2006 : à l’occasion de la fête de saint Antoine, et pour célébrer ses 30 années d’existence, elle cherche de nouvelles routes, de plus en plus efficaces, pour aider les pauvres à survivre grâce à leurs propres forces.

Angola : espoirs de survie
Damba est un village de la province de Uige dans le Nord de l’Angola, d’environ 200 000 habitants. « Une bonne partie de la zone, raconte le couple de “Médecins pour l’Afrique”, nos interlocuteurs, ne peut être atteinte pendant la période des pluies, et pendant ce temps des gens meurent, surtout les femmes enceintes et les enfants. Nous avons vu mourir une jeune maman à cause d’un accouchement difficile. Elle venait d’un village, à 50 km d’ici, mais il n’y a eu rien à faire. Elle a laissé 7 enfants et un mari. » Ainsi 1 500 à 2 000 femmes sur 100 000 meurent ici lors de l’accouchement, contre 10-12 sur 100 000 en Europe.
Les deux hôpitaux de Damba et de Maquela do Zombo, dont s’occupe notre projet, ont été réhabilités en 2003 par l’ONG “Médecins pour l’Afrique-Cuamm”. Ces deux hôpitaux, seuls services sanitaires pour une population de 700 000 habitants, avaient été fermés à cause de la guerre civile qui a ravagé le pays de 1975 à 2002, et a rendu l’Angola un des pays les plus pauvres du monde.
« Notre but, explique le père Luigi Mazzucato, directeur de “Médecins pour l’Afrique”, est d’améliorer les services et la formation du personnel des hôpitaux mais aussi de recréer un réseau sanitaire de base pour soigner sur place les malades les moins graves, raccourcir les distances entre les services sanitaires et soigner à l’hôpital seulement les cas les plus sérieux. » Mais créer un réseau sanitaire nécessite : une école de médecins et d’infirmiers de la zone ; la capacité d’inclure des opérateurs sanitaires non conventionnels, comme les sages-femmes traditionnelles ; l’achat des matériaux de construction, des équipements, des médicaments, des moyens de transport, des meubles, du combustible… Un engagement très onéreux, et de longue durée.
La Caritas Saint-Antoine a accepté de faire partie d’un réseau d’acteurs beaucoup plus vaste, comprenant les autorités sanitaires angolaises, le diocèse de Uige et la Communauté Européenne.
Un projet qui permettra à toute une population, menacée par la malaria, le Sida, la fièvre hémorragique et la tuberculose, d’espérer et de survivre.

Montant du projet : 227 000 euros sur trois ans

 

Ethiopie : entre le silex et le silicium, la faim
Sœur Elisa Tonello, missionnaire salésienne, a un petit visage et de grands yeux bleus… comme le ciel de Zway, une petite ville dans le cœur de la Rift Valley, au centre de l’Ethiopie, à environ 200 km au sud d’Addis Abeba.
« Les femmes des villages de l’arrière-pays, raconte Sœur Elisa, font jusqu’à 30 kilomètres par jour pour aller chercher de l’eau potable. Il n’y a ni route, ni service sanitaire. Les populations vivent d’agriculture, souvent anéantie par les caprices du climat. Le reste, c’est la faim. 70% des enfants sont sous-alimentés. »
« Au début, poursuit-elle, quand un enfant allait mourir, je m’échappais de la maison. Puis, avec le temps, même l’absurdité devient quotidienne : maman obligée de choisir celui de ses jumeaux qui doit continuer à vivre ; enfant qui meurt le jour de Pâques »… C’est ainsi que la mission a été créée, en 1987. Mais, depuis la dernière famine de 2003, c’est l’indignation : « Cinq sœurs ont permis à 10 000 personnes de survivre. Est-ce possible que l’on ne puisse faire plus ? » A côté de cela, « Zway a été câblée avec des fibres optiques. Sur le papier, nous sommes dans l’âge des ordinateurs, du silicium, mais l’hôpital le plus proche est à trois heures d’ici et chaque classe d’école compte 150 élèves, assis par terre. Voilà le vrai âge du silex… » Et entre le silex et le silicium, il y a la faim.
Depuis, les Sœurs Salésiennes ont construit des puits dans les villages les plus éloignés des sources d’eau, mais elles cherchent surtout à créer un système équitable qui puisse renverser le sort de cette région et assurer un approvisionnement alimentaire constant, même pendant une famine.
Sœur Elisa a un modèle dans sa tête : construire, dans des zones stratégiques, un réseau intégré de services, exploitant les ressources humaines et naturelles de la région, avec des pépinières, des arbres fruitiers, des plantes pour le reboisement. Selon ses calculs, 15 000 personnes pourraient en bénéficier directement, et 129 000 indirectement.
Pourquoi ne partagerions-nous pas ce rêve avec elle ?

Montant du projet : 150 000 €

 

Ghana : vaincre l’ulcère de Buruli
Le père Georges Abram, Franciscain Conventuel, au Ghana depuis 30 ans, est un homme timide, réservé, avec, à son actif, un record insoupçonné : la victoire sur la lèpre, un travail qui lui a valu le prix Raul Follereau. Mais un autre mal l’attendait : l’ulcère de Buruli.
« Un universitaire italien est venu un jour me rendre visite, raconte-t-il, et m’a demandé de lui montrer un cas de cette maladie : c’était à Amasaman, dans le district rural de Ga, dans le Sud du Pays. » A l’époque le père Abram ne connaissait pas la maladie, et resta pétrifié quand il rencontra un enfant assis devant une cabane, un ulcère saignant sur le zygoma droit, sa main gauche bandée, tandis que la droite chassait les mouches, ses jambes et ses pieds complètement dévastés par les plaies. « Que faites-vous pour votre enfant ?, demanda-t-il aux parents qui répondirent : “Le soir, nous le faisons rentrer dans la maison, le matin nous le faisons asseoir dehors”. » Une réponse inacceptable, mais qui avait une explication : pour ces gens, une maladie inguérissable qui frappe un innocent est une punition de Dieu…
Cette nuit-là, le père Abram ne put fermer l’œil, et le lendemain, il alla demander aux parents de le laisser partir avec l’enfant. « C’était un risque énorme, dit-il. Si l’enfant mourait, comment expliquer que c’était seulement une maladie et non une punition de Dieu ? » Mais l’enfant guérit.
L’ulcère de Buruli est causé par une mycobactérie qui prolifère dans l’eau stagnante. Elle frappe principalement les enfants et se manifeste d’abord par un nodule non douloureux qui s’ulcère progressivement, détruit les nerfs et bouche les vaisseaux lymphatiques. En progressant, l’ulcère arrive à la nécrose des tissus et des os, provoquant la fixation des jointures ou l’amputation spontanée des membres. Il détruit les yeux. Difficile à diagnostiquer, il est presque impossible à soigner chez les plus démunis. « Aussi, poursuit le père Georges, avons-nous commencé à Amasaman, par la construction d’une salle opératoire et d’un pavillon de 20 lits. La première année, nous avons soigné 2 200 malades. Aujourd’hui, ils sont environ 700. »
Pour ce résultat, il a fallu travailler à la bonification des zones marécageuses, à la construction de puits pour l’eau potable, et surtout impliquer les guérisseurs locaux. Ainsi Amasaman a-t-il pu devenir un modèle qui sera exporté dans d’autres zones endémiques et le premier transfert aura lieu à Dunkwa, en pleine forêt équatoriale. « Nous avons besoin de deux salles opératoires, souligne le père Abram, et d’un pavillon de 40 lits. »
Le père Georges prévoit que l’urgence “ulcère de Buruli” durera 10, 12 ans. Par la suite, « ce petit hôpital, construit grâce à l’aide de la Famille antonienne, deviendra un service pédiatrique, et la salle d’opérations de l’hôpital, une pièce importante de la Santé publique du Ghana. »

Montant du projet : 150 000 €

Updated on 06 Octobre 2016