L’Église et l’argent : qu’en fait-elle ?

20 Janvier 2015 | par

Alors que le Carême démarre au milieu du mois, les catholiques vont être appelés, comme chaque année à cette époque, à répondre à la campagne annuelle du denier de l’Église dans leur diocèse. Cet argent donné par les fidèles, sous différentes formes, permet à l’Église de fonctionner ici-bas. Chaque participation est déjà généreuse et chaque don compte !



 

Avant la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, tous les revenus d’une paroisse catholique en France métropolitaine étaient gérés par un Conseil de fabrique et la commune pouvait être appelée à y suppléer en cas d’insuffisance. Le curé et la plupart des vicaires étaient rémunérés par l’État. La loi de 1905 a donc changé cette situation, sauf dans les départements d’Alsace et Moselle. En Belgique, les prêtres sont aussi rémunérés par l’État, mais aujourd’hui, en France, c’est à la paroisse d’assurer toutes les dépenses courantes liées à une occupation de l’édifice et, bien sûr, toutes les charges de la vie de la paroisse. Les ressources de l’Église proviennent de plusieurs actes d’offrande : le denier de l’Église, des legs et donations, les quêtes, les cierges, des dons et des troncs, des ventes de charité, des aides reçues par des associations, le casuel, les offrandes de messes. Par leurs dons, les fidèles s’engagent et permettent à l’Église de vivre et de se développer.

 

Donner au denier

Dès 1906, les évêques ont mis en place un « denier du culte » assuré par les fidèles pour subvenir aux besoins du clergé. Ce don au culte est aujourd’hui appelé le denier de l’Église. L’Église ne vit que de la générosité des fidèles et le diocèse ne reçoit ni aide ni subvention pour assurer les salaires du personnel qu’il emploie. Le denier, ressource principale du diocèse, permet en priorité de rémunérer les prêtres, en activité et à la retraite, et les salariés laïcs du diocèse. Il permet aussi à l’Église d’accomplir sa mission : évangéliser et annoncer la Parole de Dieu, éduquer, célébrer les grands moments de la vie et servir tout homme. Le denier permet également d’assurer de nombreuses dépenses indispensables : frais de fonctionnement, immobilier, entretien, aménagement des locaux paroissiaux, financement des activités d’animation et de formation. Les temps forts de l’Église tels les Journées Mondiales de la Jeunesse et les rassemblements du Frat sont aussi en partie financés par le denier. Le denier de l’Église n’est directement lié à aucune célébration liturgique et repose ainsi entièrement sur la générosité et la responsabilité des fidèles. L’équivalent d’une à deux journées de travail est un ordre de grandeur de ce qu’un catholique peut donner au denier. 

 

Quêtes,  cierges, casuel, offrandes

L’argent donné à la plupart des quêtes sert au fonctionnement quotidien des paroisses (chauffage, électricité, entretien des bâtiments, solidarité). Certaines quêtes dominicales sont « impérées » car affectées à un usage spécifique (Vocations, Missions, Secours catholique, jumelage avec des pays en développement, etc.). La quête, faite au moment de l’offertoire, est un signe de notre participation au Sacrifice du Christ. L’argent que l’on donne représente une offrande spirituelle. La quête dite du « denier de saint Pierre », en juin, permet de venir en aide aux diocèses des pays en développement. 

Par ailleurs, le casuel, participation donnée lors d’un baptême, d’un mariage ou de funérailles, permet de participer aux frais généraux de la paroisse et de couvrir les frais occasionnés par l’ouverture de l’église. Cette offrande est faite au cas par cas, d’où son nom, pour des cérémonies bien identifiées. 

Les offrandes de messe que l’on peut faire pour les défunts et à l’occasion de messes d’action de grâce viennent compléter l’indemnité reçue par les prêtres. Le montant (17 euros) est déterminé par la Conférence des Évêques de France. Une autre manière de soutenir l’Église de demain est de faire un legs, à la fin de notre vie. Les legs, plus imprévisibles que les autres recettes, font partie des rentrées « exceptionnelles » des diocèses et permettent souvent d’équilibrer les budgets. Tous ces dons sont complémentaires et ont une place bien précise. 

 

L’Église, propriétaire foncier ?

À Paris, le mythe de l’Église riche propriétaire foncier est à tempérer. L’essentiel des églises (75 %) et presbytères appartient à la Ville de Paris depuis 1905. L’Église loue donc une grande partie des locaux qu’elle utilise. La richesse de l’Église se compose essentiellement d’œuvres d’art qui ne sont pas vendables mais existent grâce à la générosité des fidèles. Si l’on écoutait d’ailleurs saint François d’Assise, les églises devraient être pleines d’objets précieux, tant est grande la Grandeur qu’ils contiennent, c’est-à-dire le Très-Saint-Sacrement. La juste mesure est donc fondamentale à trouver. L’argent perçu par les diocèses ne supprime pas le besoin de bénévolat et de gratuité, indispensable à la vie dans l’Église. 

 

La gratuité de Dieu

« Pourquoi Jésus en a tant après l’argent? Parce que la rédemption est gratuite : c’est la gratuité de Dieu. Il vient nous apporter la gratuité totale de l’amour de Dieu, affirme le Pape François. Et lorsque l’Église ou les Églises deviennent des affairistes, on dit que le salut n’est au bout du compte pas si gratuit que cela. Et c’est pour cela que Jésus prend le fouet en main pour faire ce rite de purification du temple ». Le 21 novembre dernier, le Saint-Père avait d’ailleurs rappelé : « Il y a deux choses que le peuple de Dieu ne peut pas pardonner : un prêtre attaché à l’argent et un prêtre qui maltraite les gens ! ». Ainsi, si la générosité est vitale, notre manière de donner, de donner notre vie et de servir, sont des gouttes d’eau indispensables à l’Église ! Donnons de l’argent à l’Église et surtout donnons-nous, car ceci n’a véritablement pas de prix. 

 

 

« Nous le savons tous et nous ne devons jamais l’oublier, c’est Dieu Lui-même qui fait vivre l’Église par la force de Sa présence sacramentelle et par les fruits de l’Esprit répandu en nos cœurs par la foi. (…) La visibilité de l’action de l’Église dépend évidemment de la conviction et de la mobilisation des chrétiens. Elle dépend aussi des moyens matériels et économiques que nous sommes capables de mobiliser (…)

L’une des préoccupations auxquelles nous devons faire face est le renouvellement des donateurs au denier de l’Église. (…)

Nous n’oublions jamais que l’argent qui nous est donné a une destination prioritaire : non l’accroissement indéfini d’un capital mais l’investissement de nos ressources pour la mission de l’Église ».

 

Cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, Qui fait vivre l’Église ? 2014

Updated on 06 Octobre 2016