Les nourritures de l’homme

20 Mai 2015 | par

« Nourrir la planète, énergie pour la vie » : tel est le thème de l’Exposition universelle de Milan qui a démarré le 1er mai et se terminera le 31 octobre. Parmi les 140 pays présents, figure le Saint-Siège dont le pavillon s’intitule « Pas seulement de pain… ». Cette phrase de l’Évangile met d’emblée l’accent sur le lien étroit et inséparable entre nourriture terrestre et spirituelle.



 

Le Saint-Siège met en relief quatre thèmes pendant ces six mois à Milan : la Création à protéger ; la solidarité dans le monde ; l’éducation des nouvelles générations à ne pas gaspiller ; le pain et le vin dans le sacrement de l’eucharistie. Le Saint-Siège a souhaité être présent à cette exposition universelle pour manifester l’intention de l’Église de faire entendre sa voix, d’offrir son témoignage sur des thèmes délicats de l’avenir : ainsi, éduquer à la solidarité signifie édifier une société qui soit vraiment humaine et qui mette au centre la personne et sa dignité. En outre, nous sommes les gestionnaires, et non les prédateurs, d’une planète que nous devons rendre accueillante.

Le Saint-Siège souhaite également faire prendre conscience que l’homme ne se nourrit pas que de pain... Si la nourriture est à la base de toute vie, il n’en reste pas moins vrai que la religion est la nourriture de l’âme et sans elle, l’homme est moins capable d’habiter en profondeur son être.

 

La nourriture : carburant et lien social

C’est une évidence : nous avons besoin de nous nourrir pour grandir et nous maintenir en vie. Le besoin de l’homme et le don de Dieu se renouvellent quotidiennement. La nourriture nous empêche de mourir et nous révèle la limite de l’existence humaine et le fait d’être des créatures dépendantes. Pour les chrétiens, la nourriture est le croisement de toute une série de liens, entre Dieu et les hommes, les hommes entre eux et avec la Création. D’ailleurs, en récitant le Notre Père, nous demandons « notre pain de ce jour » : ce pain est pour tous et nous devons le partager.

Le repas est bienfaiteur sur de nombreux points : au-delà du fait de reprendre des forces, la nourriture consolide les relations et devient un facteur de socialisation, d’humanisation. La nourriture unit : en effet, lorsque l’on désire voir des amis, on invite souvent autour d’un repas ; les repas sont des moments privilégiés de convivialité car aux aliments s’ajoutent la fraternité, le partage et les mots échangés. Jésus avait bien compris cela et rassemblait souvent les hommes et les femmes autour de repas. La Cène n’est-elle pas le lieu par excellence du partage et de la communion ?

 

Les appétits du corps et de l’esprit

Différentes nourritures coexistent pour nous alimenter dans trois dimensions : les nourritures physiques qui nourrissent notre corps, les nourritures mentales qui accroissent nos connaissances et enrichissent notre intelligence, les nourritures spirituelles touchant quant à elles le plus profond de notre être.

La nourriture intérieure est donc aussi nécessaire que celle qui répond aux besoins les plus immédiats. La vénérable Marthe Robin (1902-1981) en était un exemple vivant et extraordinaire en se nourrissant d’une hostie consacrée par jour. De manière plus terre à terre, nos sens peuvent aussi nous nourrir ! Par exemple, un cuisinier qui n’a plus faim d’avoir cuisiné ne se nourrit-il pas de l’odeur de ses plats ? Le musicien qui exécute une œuvre ne se nourrit-il pas de musique ? Les nourritures de l’esprit diffèrent alors en fonction des personnes et des goûts.

 

Les nourritures célestes

Sainte Thérèse d’Avila affirme que  « la nourriture de notre Maître » est le fait que « nous gagnions des âmes, afin que ces âmes se sauvent et le louent pendant l’éternité ». Dieu aime tous les hommes et il ne sera rassasié que lorsque tous ses enfants seront réunis dans sa Maison. L’existence d’une nourriture d’un autre ordre est donc claire et la Bible regorge d’exemples. Pour n’en citer qu’un : « Le Seigneur ton Dieu t’a fait connaître la pauvreté, il t’a fait sentir la faim et il t’a donné à manger la manne, pour te faire découvrir que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur » (Deut 8, 3-18). La manne était une « préfiguration d’un pain supérieur et plus merveilleux », selon saint Jean Chrysostome. Cependant, pour donner goût à la nourriture spirituelle, il faut susciter en l’homme la faim et la soif et par là, lui montrer la voie du jeûne.

 

Le jeûne


Si la nourriture terrestre ne comble pas l’homme, Benoît XVI ajoute que le jeûne représente « une arme spirituelle pour lutter contre tous les attachements désordonnés». Le jeûne a comme finalité d’aider chacun d’entre nous à s’ouvrir à Dieu, aux autres, à avoir une vie plus généreuse. Jeûner permet de goûter à la joie de l’attente, tout comme l’on se prépare à rencontrer quelqu’un : pour s’approcher du sacrement de l’eucharistie, l’Église invite donc au jeûne – une heure avant la messe –, rendant notre corps plus perméable à l’action du Seigneur qui vient toucher nos cœurs et plus disponible pour recevoir le Christ.

 

Un Dieu qui se fait pain

« Jésus se donne à nous dans l’eucharistie, partage notre même chemin, se fait même nourriture, la vraie nourriture qui soutient notre vie », affirme le pape François lors de la solennité du Corpus Domini, en 2013. Par l’eucharistie, le Christ, vrai pain descendu du ciel, assume toutes les faims du monde et des hommes. « Le Seigneur distribue pour nous le pain qui est son Corps, Il se fait don », ajoute le Pape. Le pain qui n’est autre que l’aliment de base dans le monde occidental.

L’eucharistie, « sacrement de la communion qui nous fait sortir de l’individualisme », selon les mots du Pape, nous unit au Christ et à nos frères qui partagent ce même repas. Qu’à la même table, nous sachions ouvrir nos yeux aux nécessités du monde pour que personne ne manque du « pain quotidien ». 

 

« Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4,4).

Le vrai jeûne a donc pour but de manger « la vraie nourriture », qui consiste à faire la volonté du Père (cf. Jn 4,34).

Si donc Adam désobéit à l’ordre du Seigneur « de ne pas manger du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal »,

le croyant entend par le jeûne se soumettre à Dieu avec humilité, en se confiant à sa bonté et à sa miséricorde. (…) Les Pères de l’Église aussi parlent de la force du jeûne, capable de mettre un frein au péché, de réprimer les désirs du « vieil homme »,

et d’ouvrir dans le cœur du croyant le chemin vers Dieu. Le jeûne est en outre une pratique récurrente des saints, qui le recommandent. 

 

Message de Benoît XVI  pour le Carême 2009


 

 

Updated on 06 Octobre 2016