Oser les métiers manuels

Alors qu’en janvier les lycéens s’apprêtent à choisir leurs études supérieures, Le Messager s’est concentré sur la voie des filières manuelles.
20 Janvier 2019 | par

Que l’homme « soit artiste ou artisan, entrepreneur, ouvrier ou paysan, manuel ou intellectuel, c’est l’homme qui travaille, et c’est pour l’homme qu’il travaille. » Ces paroles de saint Paul VI ouvrent les cœurs des jeunes à tous types de métiers et rappellent que, dans le travail aussi, l’homme est premier. Si le travail est « une donnée fondamentale de la condition humaine » conférant à l’homme une place dans la société et une raison de vivre, il revêt également « les plus hautes lettres de noblesse », selon Paul VI. Sans oublier que le Fils de Dieu eut aussi un métier, celui de charpentier, comme son père adoptif Joseph.
À l’heure du choix difficile de l’orientation, les parents jouent un rôle déterminant. La peur des parents de lancer leurs enfants dans des études courtes reste forte et ils souhaitent que leurs enfants aient au moins leur baccalauréat. La réflexion de l’orientation vient souvent après. Pourtant, les formations généralistes peuvent ne pas être un choix pertinent pour certains qui se perdent en cherchant indéfiniment leur voie dans ces études trop générales.

Manuel et intellectuel
En France, les études courtes n’ont pas la cote et les métiers manuels ont souvent eu une mauvaise image en étant dévalorisés. La voie générale fut longtemps réputée comme étant la meilleure. Outre la pression parentale, l’école a entretenu l’opposition entre métiers manuels et intellectuels. Les bons élèves sont poussés vers la voie générale menant aux métiers intellectuels. La voie des métiers manuels est laissée pour ceux qui n’aiment pas étudier. Le système scolaire doit retrouver et retransmettre les vertus des métiers manuels perdues au fil des années. Le travail intellectuel et manuel se conjuguent sans cesse dans le travail des artisans ! Dans son Exhortation apostolique Redemptoris custos, saint Jean Paul II avait souligné que le travail manuel prenait un accent spécial dans l’Évangile : « Grâce à son atelier où il exerçait son métier en même temps que Jésus, Joseph rendit le travail humain proche du mystère de la Rédemption ».

Le choix du concret
Des milliers de jeunes, diplômés d’un Bac + 5, sont déçus par le marché du travail et choisissent de se réorienter vers des métiers manuels. Choisir un cursus non classique ou se réorienter demande une certaine détermination et du soutien. Avoir un métier manuel c’est croire que son rôle dans la société a un sens. La jeune génération, dite digital natives est justement prête à utiliser ses mains hors d’un clavier. Elle ne veut pas faire de travail inutile, ne veut pas s’ennuyer ni s’épuiser. Prêts à faire des efforts, les jeunes peuvent se lancer, plus facilement que leurs aînés, dans une voie de métiers manuels. Mais il ne suffit pas de vouloir faire un métier manuel, il faut trouver celui qui correspond à vos talents, vos goûts et votre caractère. Ceux qui aiment le concret et ne souhaitent pas un cursus long peuvent aller dans des filières centrées sur un métier : ébénisterie, menuiserie, plomberie, boucherie, etc. Grâce à ce diplôme en poche, l’entrée dans le monde du travail sera rapide. Être dans sa voie et à sa place permet à l’homme d’être en un certain sens plus homme.

Oser
L’université de Chicago a récemment mené une étude mondiale afin de connaître les travailleurs les plus satisfaits de leur travail. En premier arrivent le clergé, les pompiers, les kinésithérapeutes, les auteurs, les professeurs et artistes. Cela montre qu’exercer un métier manuel et artistique est source de bonheur ! Les jeunes qui se poseraient des questions d’une voie manuelle ne doivent pas hésiter à faire des stages dans des ateliers, des petites structures, des entreprises spécialisées où ils découvriront peut-être plusieurs métiers. Ils réaliseront aussi que les filières manuelles connaissent un fort recrutement et peu de candidats. Parfois, ils doivent oser prendre une filière différente que leurs aînés et avancer avec les paroles du pape François dans leur cœur : « L’uniformité est un grand ennemi ».

Cœur, mains, cerveau
À plusieurs reprises, le pape François a soutenu qu’il y avait trois langages : ceux de la tête, du cœur et des mains. Une éducation intégrale doit « enseigner à penser, aider à bien ressentir et accompagner dans l’action, afin que les trois langages soient en harmonie ». L’éducation ne doit pas être seulement de l’ordre du langage de la tête. Et d’accentuer : « l’éducation officielle s’est appauvrie à cause de l’héritage du positivisme. Elle ne conçoit qu’un technicisme intellectuel et le langage de la tête. C’est pour cette raison qu’elle s’est appauvrie. Il faut rompre avec ce schéma. » Une éducation basée sur l’intellect (la tête), les sentiments (le cœur) et l’action (les mains) est plus complète. Intégrer de manière harmonieuse les différents savoirs de l’esprit, du cœur et des mains, aide les jeunes à construire leur personnalité. « Nous pensons souvent, déplore le Pape, que l’éducation est de donner des connaissances, et nous laissons en chemin des analphabètes émotifs, et des jeunes avec tant de projets inachevés parce qu’ils n’ont pas trouvé quelqu’un qui leur enseigne à “faire”. Nous avons centré l’éducation sur le cerveau, en négligeant le cœur et les mains. » Faire étudier une quantité de choses peut être excessif, alors que si les jeunes connaissent leurs racines, ils seront davantage attirés par un métier concret, manuel, alliant naturellement le cerveau, les mains et le cœur !

Updated on 20 Janvier 2019
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