Surmonter le chômage en famille
Le chômage, thème central des débats politiques en Europe occidentale depuis une cinquantaine d’années, est aussi un sujet fondamental dans l’intimité des familles. S’il semble plutôt en régression sur le plan des statistiques nationales en France, avec un niveau d’environ 7,3 % en 2025 contre plus de 10 % en 2015, il reste une expérience vécue par une grande partie de la population au fil des aléas de la vie professionnelle, avec des conséquences parfois lourdes sur l’équilibre familial.
Pour Jean-Paul, 55 ans, ancien entrepreneur et père de deux enfants qu’il ne voit plus depuis son divorce, la faillite de son entreprise a constitué un choc violent. « Je me suis retrouvé accablé de dettes et je suis tombé dans la dépression et “la galère” comme disent les jeunes », explique cet homme qui menait autrefois un train de vie confortable, mais qui a fini par être contraint de se tourner vers l’aide alimentaire des conférences de Saint-Vincent-de-Paul. « La protection sociale pour les salariés licenciés est très organisée en France, mais on oublie les situations de grande détresse de certains entrepreneurs qui, dans certains cas, perdent tout, y compris leur patrimoine personnel », explique cet homme isolé, qui se sent perçu comme « un riche parmi les pauvres, et un pauvre parmi les riches ». Portant encore veste et cravate, il détonne en effet parmi les personnes n’arrivant plus à joindre les deux bouts.
Cet ancien chef d’entreprise, touché de recevoir une écoute sérieuse au sein de cette association inspirée de la spiritualité du bienheureux Frédéric Ozanam, y trouve un motif d’espérance pour rebondir sur le plan professionnel et personnel. De culture catholique mais ayant pris ses distances en raison de son emploi du temps autrefois surchargé, il vit actuellement un parcours de rapprochement vers l’Église en espérant renouer le contact avec son ex-femme et ses enfants.
Neuvaine familiale
Pour Laurent et Claire, mariés depuis 20 ans, oblats de l’abbaye de Lagrasse et parents de cinq enfants, la foi a été un soutien permanent dans la recherche d’emploi. Longtemps cadre dans une grande banque, Laurent, à 50 ans, a fini par quitter son travail début 2024 dans le cadre d’un vaste plan social impliquant la suppression d’un millier de postes. « Il a alors créé son entreprise de conseil, sans trop s’inquiéter pour l’avenir car nous savions que son profil serait intéressant pour différentes missions. Mais cela a pris beaucoup plus de temps que prévu, probablement en raison des incertitudes que l’élection de Donald Trump a fait peser sur l’économie mondiale », explique Claire.
Les indemnités de départ confortables ont mis la famille à l’abri du besoin au moins pour un temps, mais au fil des mois, l’impact psychologique de l’absence de réponses positives à ses offres de service a été lourd. « Laurent a eu plusieurs entretiens très encourageants, avec des contrats qui semblaient presque acquis », raconte son épouse. « Mais à quatre ou cinq reprises, au dernier moment, cela ne s’est pas concrétisé. Un moment donné, avec cinq enfants dont certains s’approchent des études supérieures, tu commences à flipper. Son moral en était très affecté, il m’a dit qu’il avait l’impression de ne servir à rien. »
La fratrie s’est mise en ordre de bataille pour soutenir la recherche d’emploi du père de famille, priant notamment une neuvaine à saint Joseph à cette intention. « Notre petit dernier, qui a neuf ans, a été choqué quand il a entendu pour la première fois le mot “chômage”. Il a beaucoup prié pour son papa. Il me demandait tous les jours s’il avait retrouvé du travail », raconte Claire. La mère de famille souligne aussi l’effort d’un de leur fils, lycéen, qui a participé en avril dernier au Frat’ de Lourdes, alors qu’il n’aime pas ce type de rassemblements, afin de prier à cette intention. « Avec ce que je supporte en louange, si Papa n’a pas un boulot à mon retour de Lourdes, je ne comprends plus rien ! », a-t-il alors lancé avec un brin d’ironie.
Tout s’est finalement décanté au début de l’été. « Le 2 juillet, nous avons fêté notre 20e anniversaire de mariage avec une messe dans l’intimité familiale. Nous savons que deux autres messes à notre intention ont été célébrées en même temps, par l’abbé de Lagrasse, et par le curé de notre paroisse. Laurent est parti quelques jours ensuite à Cotignac, afin d’apporter une assistance logistique sur ce lieu de pèlerinage dédié à saint Joseph et aux pères de famille. Et c’est exactement à ce moment-là qu’il a finalement reçu une proposition de mission pour une grande multinationale, avec démarrage immédiat », raconte Claire.
Cette mission devrait s’achever en décembre, mais « d’autres boîtes, en quête d’un profil plutôt senior et expérimenté, continuent à le contacter », explique Claire. Cette pétillante mère de famille reconnaît que « la rentrée a été un peu acrobatique », mais elle est reconnaissante pour tous ceux qui ont prié afin que son mari retrouve une mission conforme à ses compétences.