Visiter les prisons : la miséricorde en actes

Ce 6 novembre, à quelques jours de la fin de l’Année de la Miséricorde voulue par le pape François, les prisonniers et visiteurs de prison vont eux aussi vivre leur jubilé.
07 Novembre 2016 | par

Aller à la rencontre de ceux qui sont exclus est probablement plus facile que d’ouvrir les communautés chrétiennes à l’accueil des étrangers et des exclus. Alors commençons par ce premier mouvement qu’est la sortie de soi et l’intérêt pour l’autre. Visiter des prisonniers, des pauvres, est une œuvre de miséricorde car venir en aide à son prochain est une action charitable. Le Seigneur nous demande d’accueillir la personne telle qu’elle est, y compris dans sa plus grande misère, physique ou morale. Ne l’a-t-il pas lui-même exprimé ainsi, en s’identifiant avec les détenus ? : « J’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi » (Mt 25, 36). « Partout où il y a quelqu’un qui a faim, un étranger, un malade, un prisonnier, là se trouve le Christ lui-même qui attend notre visite et notre aide », assurait Benoît XVI lors d’une visite à la prison de Rome, et d’ajouter : « Les prisonniers sont des personnes humaines qui méritent, malgré leur crime, d’être traitées avec respect et dignité. Ils ont besoin de notre sollicitude. » Saint Vincent de Paul (1581-1660), le premier aumônier des prisonniers et grand saint de la charité, aimait à rappeler que cette attention devait être aussi bien spirituelle que temporelle.

 

Hérauts de la compassion

La prison est une privation de liberté. Les prisonniers et les détenus sont donc isolés voire rejetés. Ainsi, les visiteurs de prison souhaitent les ramener dans le droit chemin et leur proposer un avenir en essayant de les aider à retrouver un but dans leur vie. Les aumôniers et leurs collaborateurs sont alors appelés à être les « hérauts de la compassion et du pardon infinis de Dieu », selon Benoît XVI. Leur patience et leur persévérance sont mises à rude épreuve, mais ils agissent en sachant que toute personne est plus grande que les actes qu’elle a commis. Nul ne devrait être réduit à l’acte qui l’a conduit en prison, aussi horrible qu’il soit. Tout en affirmant les exigences de la justice humaine nécessaire, Jean-Paul II expliquait que « la peine, la prison, possèdent un sens, si elles servent au renouvellement de l’homme, en offrant à celui qui a commis une erreur une possibilité de réfléchir et de changer de vie, pour se réinsérer à plein titre dans la société. »

 

Accueillir, écouter, apaiser

La mission des aumôniers ou visiteurs de prison, lieu de profonde détresse, est par conséquent l’écoute. Dans la parabole de l’enfant prodigue, le Père ne pose aucune question à l’enfant qui demande de l’accueillir. Il va à sa rencontre et l’accueille en silence. Par sa seule présence, le visiteur libère, réconcilie ce qui était déchiré, remet debout ce qui était écrasé, fait renaître à une vie nouvelle ce qui était sans espoir et sans force. Peut-être que les personnes en prison n’ont pas entendu le nom de Jésus, mais ce qu’elles ont vu, c’est l’œuvre qui s’accomplit envers elles, ce sont les signes de respect et d’amour qui leur sont donnés au nom du Christ. La police pénitentiaire féminine exerce en ce sens une fonction qui exige une « solide maturité humaine », leur permettant de « conjuguer la fermeté avec l’attention aux personnes », reconnaissait déjà Jean-Paul II en 2004. Il estimait aussi que « le fait d’être femmes (est) assurément utile, en raison des qualités proprement féminines qui jouent un rôle positif dans les relations humaines ». Tant de bénévoles, salariés et de congrégations religieuses se consacrent aux prisonniers, ces hommes et ces femmes égarés, perdus, qui doivent se réconcilier avec la société.

 

Des sœurs pour la prison

La congrégation des Sœurs de Marie-Joseph et de la Miséricorde, créée pour assurer une présence en milieu carcéral, avait été appelée par l’administration pénitentiaire dans toutes les grandes prisons de France dès le début du
XIXe siècle. À Paris, elles ont été installées à la préfecture de police, sur l’île de la Cité, de 1865 à 2013. Le service de ces religieuses, pour la section des femmes, pendant 148 ans, a apporté humanité et sérénité aux détenues. Le climat anxiogène d’une prison est marqué par des miradors, des grilles, des caméras, du béton et de la violence. La présence auprès de ces femmes en milieu carcéral demande une oreille attentive, un réconfort et une consolation. Elles nous appellent aussi à changer notre regard et sortir de notre jugement si facile sur une personne condamnée. Cette attitude est aussi éminemment évangélique : « Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25, 40).

 

L’amour libérateur

En visitant des jeunes détenus, le pape François leur avait conseillé de prendre le Seigneur comme « maître intérieur » qui les « guide constamment sur les chemins du bien ». Il les a aussi invités à transformer la porte de leur cellule en une porte sainte en espérant que ce geste signifie pour eux « le passage de la Porte sainte, car la miséricorde de Dieu, capable de transformer les cœurs, est également en mesure de transformer les barreaux en expérience de liberté ». Ces mots font largement écho à ceux de Jean-Paul II, pour le jubilé des prisons : « Je souhaite à chacun de vous de faire l’expérience de l’amour libérateur de Dieu. » Les mots de Benoît XVI furent également très clairs : « Demandons dans le silence et dans la prière d’être tous libérés de la prison du péché, de la suffisance et de l’orgueil ». Pour le pape émérite, chacun a « besoin de sortir de cette prison intérieure pour être vraiment libéré du mal, des angoisses et de la mort. » Laissons-nous rejoindre par ces paroles et ouvrons-nous sans relâche à l’amour de Dieu, libérateur. n

Updated on 07 Novembre 2016
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